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La cueillette des mûres
c’est la débâcle du mois d’août
à petits geste de couleur
mais oui c’est moi
agenouillé devant les ronces
bras passés dans les orties
les chardons
et je m’assois les doigts pleins de sucre
à écouter la grive
je me lève devant la dame au petit chien
cultivatrice en retraite
à qui la vie n’a pas fait de cadeau
je pourrais lui dire qu’elle est belle
je ne lui dis rien
Marianna ‘r Vod
l’ancien chemin caché par les ronces
pressée
elle reprend sa route vers Penn ar Menez
les mûres dans le saladier en verre
les mûres dans la boîte en plastique
chauffent
terre chiche
faite pour le coup de griffe
se peindre la bouche
se faire les dents noires
je me souviens que tu ne voulais plus
de ton corps
recousu sein perforé
je dormais contre
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A cent mètres du mur
l’oiseau forgeron est l’oiseau de destin
matériau symbolique religion estropiée
la rue en est pleine
tout se nourrit de l’ordinaire
de la rue où tout le monde va aux affaires
roses et cassis en novembre
graines sur catalogue
je suis furieux vivre ici pour ça
rappelle-toi les mauvaises saisons
été printemps
tout ce qui touche à l’histoire du monde
et qui t’observe sans pouvoir parler
toujours la même histoire
l’épanouissement posthume
où un oiseau sans mémoire
plaît aux dieux ravis par la grâce
ça se joue comme au théâtre
j’ai en moi l’amour
du hibou
venu se jeter dans les fils électriques
Paol Keineg, Abalamour, dessins de François Dilasser, Les Hauts-Fonds, 2012, pp.23 et 24
Paol Keineg dans Poezibao :
Bio-bibliographie, extraits 1, extraits 2, Les Trucs sont démolis (T. Hordé)