Reprise depuis quelques semaines au Rive Gauche, la pièce d'Eric Emmanuel Schmitt, "Monsieur Ibrahim et les Fleurs du Coran", se trouve fort efficacement portée par le chanteur-acteur qui s'investit entièrement dans la narration de ce conte initiatique plutôt joliment écrit, en dépit d'un discours moralo-philosophico-sociétal parfois simpliste.
De quoi est-il question ici ? De l'amitié liant un jeune garçon juif prénommé Moïse à l'épicier musulman du bas de son immeuble, Monsieur Ibrahim. N'ayant jamais connu sa mère, élevé par un père souvent absent, Moïse fera du commerçant son confident, son référent, son éducateur puis son père adoptif. Deux êtres, deux cultures qui s'uniront pour entonner un hymne à la vie, à l'amour, somme toute sympathique.
Dirigé avec finesse par Anne Bourgeois, Francis Lalanne, seul en scène, fait preuve d'une appréciable technique de jeu. Sa sincérité est totale, éloquente, ses compositions sonnent juste, qu'il soit Moïse ou Ibrahim, la voix en impose, le rythme est excellent. Rien à redire, vraiment, à propos d'une interprétation qui ne cherche jamais la performance d'acteur ou l'épate, mais bien l'authenticité. De son côté Nicolas Sire signe une séduisante scénographie "multi-lieux", chaleureuse, simple et élégante. Les ponctuations musicales de Jacques Cassard contribuent pour leur part subtilement et agréablement au climat du spectacle.
Vous l'aurez donc compris, c'est le fond de l'oeuvre de Schmitt qui fait l'objet de nos réserves. Dans sa volonté permanente de produire une philo accessible au plus grand nombre, à trop vouloir se mettre au niveau de la ménagère spectatrice du "Juste Prix", l'auteur finit par sous-estimer son public, dans une condescendance quelquefois pénible, et tomber dans des fadaises que rien ne justifie. Ici, cependant, la pièce habilement troussée, dramaturgiquement non dénuée d'intérêt, reste supportable et plaisante, contrairement aux dernières propositions du nouveau propriétaire du Rive-Gauche.
Un peu longuet...
Mais enfin pourquoi pas.