Les cendres froidesValentin MussoÉditeur : Points (2012)
Comme à son habitude Erika Fabre en bonne voisine, vient à la ferme de Soulanges non loin d'Arvillières pour chercher la vieille « demoiselle », Nicole Brachet une ancienne infirmière aigrie, âgée aujourd'hui de 80 ans, afin de l'amener faire ses courses. Quand elle entre dans la maison, ne la voyant pas sur le perron, elle ne s'attendait pas à trouver l'habitation sens dessus dessous et encore moins la vieille dame ligotée sur une chaise au fin fond du garde-manger, la tête en sang, sans vie. le jeune couple de lieutenants de la Gendarmerie de Châlons-en-Champagne formé par Frank Launay et Émilie Duhamel conclut à un cambriolage qui a mal tourné étant donnée la maison vandalisée. La région depuis quelque temps est victime d'une bande s'adonnant au homejacking « des vols rapides avec menace commis chez des particuliers ». Pourtant un porte-monnaie contenant 2000 francs, n'a pas disparu, le duo de lieutenants semble persuadé que le vol n'était pas le mobile et que les voisins ont forcément vu quelque chose. Finalement prise de remords une voisine finit par avouer quel a vu une voiture blanche le jour du meurtre partir en trombe de la ferme et qu'elle a même accroché le portail, un élément précieux qui associé à d'autres va permettre de faire avancer l'enquête. On est en 1999 et à cette même période, non loin de là, le jeune Aurélien Cochet fait des recherches dans la maison de son grand-père sans savoir que son histoire familiale est infiniment liée à cette femme Nicole Brachet que l'on a retrouvée morte. Aurélien Cochet est professeur en classes prépa cinéma et audiovisuel, une passion qu'il a héritée de son grand-père paternel « Abuelo », il a la trentaine et accepte avec une certaine indifférence les aléas que la vie lui réserve. Son père jeune divorcé est décédé d'un accident de voiture à l'âge de 46 ans, on venait de lui diagnostiquer un cancer, accident de la route ou suicide Aurélien a toujours eu un doute. Sa sœur cadette Anna a toujours été dépressive après le décès de ce père auquel, elle était très attachée. L'embolie cérébrale qui vient d'emporter le grand-père n'est pas pour arranger les états d'âme du frère et de la sœur, Alice la compagne du grand-père les aide à faire le tri dans cette grande maison qu'il faut débarrasser de toutes ces vieilleries accumulées au fil des ans. En triant les bobines de film, Aurélien déniche en haut d'une étagère comme si on l'avait caché, un carton ou est collé un post-it indiquant le nom d'Hélène Tournier et un numéro de téléphone. Dans le carton, il découvre une bobine de film 9,5 mm, un format datant d'avant les années 50. Au visionnage, le film met en scène de grandes jeunes femmes, blondes, enceintes, des infirmières, une nursery aménagée dans un manoir. La scène suivante révèle un salon de réception où son grand-père et un officier SS trônent sous une banderole affichant « wilkommen ». Son grand-père était médecin gynécologue obstétricien, Aurélien se rend compte qu'il n'a jamais vraiment parlé de la Seconde Guerre Mondiale en dehors du fait qu'il avait sa carte de Combattant Volontaire de la Résistance ce qui concorde bien peu avec ce qu'il a vu sur le film. Il se garde bien de révéler à sa sœur ce qu'il a découvert, en faisant quelques recherches sur Internet, il apprend l'existence de « Lebensborn » ou « fontaines de vie » qui sont en fait des maternités qui accueillaient des femmes enceintes de SS ou de la police afin de préserver la « race aryenne », deux centres ont existé en France (un est purement fictionnel). Aurélien veut comprendre pourquoi son grand-père qu'il admirait tant a tu cette partie de sa vie, il appelle le numéro de téléphone mentionné sur le post-it sans savoir encore que les secrets qu'il va déterrer vont changer sa vie à tout jamais. C'est un puzzle de longue haleine que l'auteur a mis en place, alternant présent et passé révélant la pratique de la sélection raciale durant la Seconde Guerre Mondiale sur le sol français. L'intrigue est fort bien construite, n'offrant pas un suspens haletant mais un style fluide et une approche historique intéressante car pas lassante du tout. Comme dans son précédent roman « La Ronde des Innocents » l'auteur a construit son histoire en une double enquête ceci dit peu de place à l'enquête policière, le roman est surtout consacré à Aurélien et à l'histoire de sa famille. Sa pugnacité aura raison des lourds mensonges familiaux et la vérité n'est pas toujours celle que l'on croit. Un thriller très soft qui manquera d'action pour les puristes mais qui plaira à ceux et celles qui aiment dénuder les fils des secrets de famille. Ce livre a été lu dans le cadre de l'opération Masse critique organisé par Babelio que je remercie ainsi que son partenaire les éditions Points.