Magazine Cinéma

Cinéblabla #3

Par Deuz

Explications et théories sur Prometheus


Cinéblabla #3
S'il y a une chose que l'on peut dire sans risque sur Prometheus, le dernier film de Ridley Scott, c'est que celui-ci suscite bien des débats parmi ses nombreux spectateurs, que ce soit quant à la qualité même du métrage (sur laquelle nous nous sommes déjà étendus dans le précédent article), mais aussi sur les diverses incompréhensions et interrogations pouvant apparaître suite à sa vision. C'est sur ce second aspect que nous nous attarderons à présent, en commençant par donner des explications simples et accessibles de tous les points qui, après réflexion et argumentation, ne s’avéreront finalement interprétables que d'une seule façon, avant de développer nos propres théories sur les zones d'ombres plus sujettes aux divergences d'opinions. Bien évidemment, ce qui suit révèle des éléments clés de l'intrigue et n'est à lire qu'après avoir vu le film. 

Cinéblabla #3

"Chers passagers, le vol 93 "Terre/LV-223" arrive à destination. Veuillez gardez vos ceintures et vos masques bien attachés"


Débutons les explications en éclaircissant la fonction d'un élément étrange se trouvant au centre du scénario de Prometheus : le liquide noir. En regroupant les différentes conséquences de son exposition le long du film (que nous allons détailler), on peut facilement déduire que celui-ci est un agent mutagène qui, tel le monolithe de 2001 : L'Odysée de l'espace, se trouve être à la source-même du principe d'évolution. Malheureusement pour nous, cette évolution ne semble pas aller dans le sens de la paix sur Terre dans un océan de fleurs et de chants psychédéliques d'oiseaux hippies fans des Beatles, mais plus dans celui de la création d'êtres hargneux et agressifs aux capacités d'adaptation aussi prodigieuses que terrifiantes.

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"Nutella : chaque jour, c'est de l'horreur à tartiner !"


Lors de la scène d'introduction, on voit un Ingénieur ingurgiter volontairement cette mystérieuse substance noire, ce qui le fera se désagréger de toutes parts et tomber dans l'eau comme un ivrogne sur les bords de Seine ou les quais de la Garonne ("Ô mon pays ! Ô Toulouse !" Pardon...). La caméra virevoltante de Ridley Scott nous montre alors l'ADN de l'extraterrestre se noircir sous l'influence de cette matière visqueuse, avant de carrément se briser, pour finalement se reconstruire de manière sensiblement différente. Nous sommes donc ici en face de l'origine de l'humanité : le mélange entre l'ADN de l'Ingénieur et la substance noire, rajouté au contact de l'environnement terrestre, a ainsi créé une nouvelle base génétique qui donnera, à terme, naissance aux singes sans poils (ou presque) que nous sommes. Le principe d'évolution n'est pas pour autant mis de côté, comme le suggèrent les cellules se divisant sur lesquelles le titre du film apparaît, mais c'est l'élément déclencheur du processus et notre source génétique initiale qui sont ici réinventés.

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"Et paf, ça fait des Chocapic !"


Bien plus tard, nous verrons quelqu'un d'autre avoir la chance de savourer ce délicieux liquide noir : le professeur Holloway, qui en boit une goutte lorsque le robotique David décide de lui faire une petite blague entre collègues, en mode discret, tendance "violeur au GHB". Et là, surprise ! Notre petit Holloway ne se transforme pas en cachet Efferalgan vivant (ou plutôt mourant), comme son ancêtre l'a fait précédemment, mais en une espèce de mutant peu ragoûtant, dont la belle Vickers (Charlize Theron) aura la bonne idée de faire un barbecue géant. Pourquoi donc ? Comme le dirait un flic bourru en s'allumant une clope devant une scène de crime banale pour ses tripes qui en ont vu passées, "l'explication la plus simple est souvent la meilleure" : les êtres humains ayant justement évolués à partir de ce fluide noir, il semble logique que celui-ci n'ait pas les mêmes effets destructeurs sur nous que sur les Ingénieurs, qui y sont eux génétiquement étrangers. Ainsi, l’absorption directe de la substance noire provoque une mutation/évolution accélérée chez ceux dont la structure génétique en est déjà partiellement composée.

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"Qui veut une tranche de professeur Holloway bien grillé ?"


Dans le même sens, on aperçoit des vers de terre, lors de la découverte de la "salle à la grosse tête" (j'ai pas trouvé mieux) sur l'accueillante planète LV-223. Et ces vers de terre sont exactement les mêmes que par chez nous, vindiou ! On peut donc logiquement penser qu'ils sont, eux aussi, des évolutions du mélange Ingénieur/liquide noir (peut-être mêmes des échantillons terriens directement ramenés par les Ingénieurs, lors d'une ancienne visite de courtoisie dans le coin). Par la suite, on verra le dangereux fluide couler hors des jarres dans lesquelles il était contenu (en réaction à l'altération de l'air, provoquée par la venue de nos scientifiques/pilleurs de tombes extraterrestres), et ces mêmes petits verres se baigner joyeusement dedans, tels des vacanciers en plein été. Ils muteront alors, de la même façon que les êtres humains, en une version plus agressive, résistante et (comment le dire autrement ?) dégueulasse... C'est l'un de ces vers mutants qui attaquera ensuite Milburn (le biologiste à lunettes) et Fifield (le géologue écossais). Si Mulburn est alors simplement tué par le vers qui s'introduit dans sa gorge (Maman !), Fifield se retrouve quant à lui aspergé par le sang de la créature, en essayant de la dégager du bras de son infortuné camarade. Le fluide vital de la bestiole s'avère alors être un puissant acide (tel celui des "aliens" dans les anciens métrages), qui fait fondre son casque et le propulse la tête la première dans la piscine de coca-cola spatial se trouvant à ses pieds. Voilà pourquoi Fifield devient, quelques instants plus tard, un mutant pas trop content et décimant une bonne partie de l'équipage avec une incroyable rage. Fort est à parier, en suivant le même raisonnement, que Holloway n'aurait alors pas tardé à lui ressembler, si la fougueuse Vickers ne l'avait pas aussi vite cramé.

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"Coucou ! Je suis Norbert le ver de terre !"


On arrive maintenant à la scène la plus fantastique, choquante, stressante, angoissante, paralysante et super-hyper-méga-ultra-giga over the top de Prometheus : l'auto-césarienne d'Elizabeth Shaw ! Après avoir fait "nouknouk" avec son chéri en pleine mutation (cherchez pas "nouknouk" dans le dictionnaire, c'est de mon invention), le professeur Shaw se retrouve en effet enceinte d'un bon gros bébé, ayant atteint en un jour le développement qu'un embryon normal présenterait uniquement au bout de trois mois, ce qui inquiète un peu la jeune maman... Une petite opération de rien du tout plus tard, les doutes se confirment : "Oh ! C'est un magnifique poulpe de quatre kilos, madame !" Re-pourquoi donc ? En premier lieu, remarquons que le petit bébé poulpe n'est pas arrivé à terme, et qu'une fois bien mûr et prêt à être cueilli (car le bougre continuera à grandir en dehors du ventre de maman, ce qui est logique quand on connaît la nature "survivor" de l'espèce), il s'avèrera être un bon gros facehugger des familles ! Vous savez, ces saletés pleines de pattes qui s'accrochent à votre caboche et vous roulent une pelle bien baveuse, comme un ado tout fier d'avoir enfin retiré son appareil dentaire.

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"Qui veut un câlin ?"


Et lorsque l'on sait ça, tout fait sens ! Dans les autres épisodes de la saga, on a une reine xénomorphe (le vrai nom des "aliens") qui pond des œufs, dont éclosent des facehuggers inséminant ensuite un hôte avec un nouvel embryon xénomorphe, communément appelé chestburster (le célèbre petit Mickey qui vous transforme le bide en tartiflette au ketchup). Dans Prometheus, l'ovule d'Elizabeth fécondé par un mutant remplace donc simplement l’œuf d'alien, pour concevoir un facehugger bien plus imposant que la version habituelle et qui, après un beau bisou plein d'amour à tonton l'Ingénieur, donnera naissance à un splendide xénomorphe, lui aussi beaucoup plus gros que la face de gnocchi du "huitième passager". On peut d'ailleurs lancer une première hypothèse, quant à la différence de taille de ces gentilles bébêtes : au niveau de la reproduction, les mammifères seraient peut-être plus évolués que les ovipares (et qu'on ne me parle par de ces erreurs de la nature que sont les ornithorynques et autres monotrèmes), ce que tendrait à confirmer la place de certains d'entre eux (l'espèce humaine) tout en haut de notre chaîne alimentaire. Le facehugger en gestation dans le bidon tout rond de maman, se développerait donc logiquement d'une meilleure façon que celui abandonné dans un vieil œuf pourri et crevant de faim pendant plusieurs années au fond de la cave à vins moisie d'un vaisseau extraterrestre insalubre et malodorant. Et qui dit gros facehugger et hôte Ingénieur, soit un humanoïde géant et surpuissant, dit xénomorphe avec du poil aux pattes et au menton dès sa sortie du berceau dans une belle explosion.

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It's evolution, bitch !


Passons maintenant aux théories et autres extrapolations, en essayant de répondre à la question qui taraude l'esprit épuisé de la pourtant très énergique Elizabeth Saw, à la fin de son effroyable cauchemar sur la planète LV-223 : pourquoi les Ingénieurs nous ont-ils créé, pour finalement vouloir tous nous buter ? Pour tenter de formuler une réponse pas trop à côté de la plaque, revoyons déjà tout ce que l'on sait à ce sujet. En premier lieu, le sacrifice d'un Ingénieur mêlant son ADN avec du liquide noir a fourni la base génétique de plusieurs espèces sur Terre, dont l'humanité serait vraisemblablement un aboutissement, par son évident rapprochement avec cet étonnant créateur. Les Ingénieurs ont ensuite établi un contact avec différents peuples à des époques distinctes, en leur donnant une indication sur leurs origines, soit l'endroit où est stockée la fameuse substance noire. On sait aussi que, contrairement aux Ingénieurs, la substance noire ne nous tue pas mais nous fait subitement évoluer en effroyables et sanguinaires monstres de foire (ce qui semble logiquement valable pour toute vie terrestre, comme l'indique la transformation "express" de nos amis les petits vers de terre), mais aussi et surtout qu'une "femelle humaine" contaminée peut donner naissance à un terrifiant et colossal facehugger. Nous savons également que l'équipage du Prometheus pose le pied sur LV-223 pour Noël 2093, et y découvre des Ingénieurs morts depuis approximativement 2000 ans, soit en 90-100 après Jésus Christ (d'où l'arrêt soudain de leurs visites). Devant un charnier de ces Ingénieurs, Milburn nous apprend d'ailleurs que l'un d'entre eux semble avoir "explosé de l'intérieur", ne laissant ainsi aucun doute sur la raison de leur fin prématurée. On découvre par la suite que, lors de leur débandade face à un ou plusieurs xénomorphes affamés, ceux-ci avaient décidé de revenir sur Terre pour apparemment nous éliminer (ce que tend à confirmer l'attitude belliqueuse de celui qui sera tardivement réveillé). Enfin, notons la présence d'une représentation de xénomorphe dans la "salle à la grosse tête" (toujours pas mieux), au-dessus de ce qui semble être un tombeau, ce qui nous éclaire sur le fait que les Ingénieurs connaissaient cette espèce et nous donne une idée de la manière dont ils la percevaient. En prenant tous ces éléments dans leur globalité, après les avoir interrogés dans le détail pour certains d'entre eux, une seule interprétation possible finit alors par s’élever au-dessus des autres...

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"Je crois qu'on a découvert quelque chose, Milou !"


Voilà donc comment, à la vue des éléments précités, je vois personnellement les choses : Comme les scientifiques de l'ancienne quadrilogie, les Ingénieurs connaissaient l'existence des xénomorphes et en admiraient la perfection, en tant que prédateur ultime quasi-indestructible. Ils essayèrent alors de maîtriser cette puissance, d'en faire une arme biologique redoutable et inébranlable, but dont ils se rapprochèrent en découvrant la fameuse substance noire (qui est soit à l'origine des xénomorphes, soit créée et cultivée à partir d'expériences sur ces derniers). Afin de contrôler cette instable et explosive source d'énergie, ils décidèrent de créer une nouvelle espèce : l'ignoble rejeton d'une union interdite entre, d'un côté, la science et l'intelligence des Ingénieurs, et de l'autre, la force brutale et létale des xénomorphes. Ce monstre de Frankenstein avant l'heure, n'avait dès lors besoin que de temps et d'un environnement similaire à celui qui a vu naître et grandir ses "grand-parents". Et celui-ci fut trouvé sur une planète bleue, que le monstre lui-même appellerait plus tard la "Terre". Les Ingénieurs n'ont donc pas créé une arme pour nous annihiler : nous sommes nous-mêmes l'arme qu'ils ont tenté d'engendrer ! L'espèce humaine, sur le (très) long terme, avait pour objectif de devenir la plus puissante et terrifiante de toutes les armées ! Voilà pourquoi les Ingénieurs établirent un contact avec toute l'humanité et nous indiquèrent pour lieu de nos origines, non pas leur propre planète, mais la base scientifique et siège militaire dont ils étaient censés nous contrôler, lorsque nous serions enfin devenus les armes de destruction massive qu'ils désiraient.

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Humanity is the perfect army.


Malheureusement pour eux (et heureusement pour nous ?), le plan des Ingénieurs avait une faille : en évoluant, les êtres humains sont arrivés à un stade où, en plus de pouvoir assimiler le fluide noir, ils étaient capables de donner vie à des facehuggers (comme le fera Elizabeth), et donc de produire des xénomorphes. Le pouvoir des xénomorphes avait ainsi réussi à franchir les barrières de la volonté et de l'intelligence humaines, hérités de leurs ancêtres Ingénieurs, et avait même, au contraire, trouvé un nouveau vaisseau, un nouveau moyen de se répandre dans l'espace infini et insondable, dont il pourrait se repaître à foison. En effet, depuis le lancement de leur programme, les Ingénieurs ramenaient régulièrement des échantillons humains sur LV-223, pour pratiquer des expériences sur ces derniers et ainsi évaluer leurs progrès (nos peintures murales représentant les géants pourraient même faire référence à cette pratique : on peut par exemple imaginer que les Ingénieurs offraient aux plus valeureux de telle ou telle tribu de venir avec eux sur une supposée planète-mère paradisiaque, ce à quoi les peintures feraient référence). Mais durant l'une de ces expériences, un accident avec la substance noire a eu lieu : une humaine fut certainement contaminée et un facehugger sortit de son ventre, attaquant peut-être un Ingénieur (celui vu par Milburn ?) et donnant ainsi le point de départ du massacre de l'équipage par un xénomorphe.

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"Priviet, babouchka !"


En voyant cela, les survivants se rendirent compte du danger que représentait potentiellement l'espèce humaine : véritable foyer à xénomorphes, c'était une création imparfaite qui devait être éradiquée avant qu'elle ne puisse se retourner contre ses créateurs, même si c'était involontairement. Ils n'eurent cependant pas le temps de mettre leur plan à exécution et furent tous décimés, mis à part un unique rescapé bien au froid dans son module cryogénique... En se réveillant, 2000 ans plus tard (qui ne lui auront semblé durer qu'un instant), celui-ci découvre alors qu'il doit sa sortie du lit à un groupe d'être humains étrangement vêtus et parlant une langue qui lui est inconnue. L'un d'eux essaye de communiquer avec lui en baragouinant quelque chose de presque compréhensible, mais l'Ingénieur ne l'écoute pas vraiment, car il est surtout intrigué par le comportement et l'énergie dégagée par cet homme différent. Il comprend alors rapidement qu'il est en face d'une machine humanoïde, et si les humains ont pu créer une telle abomination, c'est que sa première intuition était belle et bien fondée : ces hommes ne sont pas des rats de laboratoire ayant survécu au massacre, mais des Terriens arrivés sur LV-223 par leurs propres moyens. Notre Ingénieur se rend ainsi compte avoir dormi de très nombreuses années et que l'espèce humaine, qui devait être exterminée, a proliféré et évolué au point de rattraper la technologie supérieure de son propre peuple. La menace que représente cette expérience échouée n'en est que plus grande, et il doit à tout prix reprendre sa mission là où elle fut malencontreusement arrêtée : il lui faut détruire l'humanité !

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"Qui a osé me réveiller ?! RHAAAA !!"


J'ai retourné tout ça dans ma petite tête un bon moment, et c'est finalement le scénario le plus probable que j'ai réussi à trouver. Pour tous les autres détails à mon avis moins importants et encore inexpliqués, tel que la manière dont sera fait le lien avec la découverte du space jockey/Ingénieur du premier volet (si ce lien existe véritablement), j'attendrai patiemment la suite plus ou moins déjà annoncée et qui, je l'espère, confirmera les théories que j'ai ici avancées (non par ego, mais par simple goût pour des histoires bien racontées). Pour finir, je signalerai juste une chose qui fera plaisir aux détracteurs du film : rien ne peut justifier le fait que Fifield, étant géologue et établissant lui-même la topographie des lieux, se perde comme un abruti fan de Gilbert Montagné dans les différents couloirs du vaisseau extraterrestre, alors que les autres scientifiques retrouvent leur chemin sans aucune difficulté. C'est une vraie grosse erreur mais, sincèrement (et je pense que c'est finalement là que se trouve le cœur du débat), ça ne m'empêchera pas dormir. Et si une chose devait tout de même troubler mon sommeil après avoir vu Prometheus, ce serait plutôt la délirante et jusqu'au-boutiste scène de césarienne que j'ai complètement adorée, comme vous vous en doutez. N'hésitez pas à me donner votre opinion sur mes différentes explications et théories, à me demander des précisions si vous trouvez que je reste trop flou sur certains éléments, ou à simplement saluer ma folie pour avoir, une nouvelle fois, rédigé un pavé aux proportions démesurées.

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"J'ai rien pigé"


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