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JR, ou l’homme qui possédait «la plus grande galerie d’art du monde»

Publié le 15 juin 2012 par Pnordey @latelier

JR, ou l’homme qui possédait «la plus grande galerie d’art du monde»

Mon expo à moi, c'est la rue

Oui, la plus grande galerie du monde. Non, ce n’est pas le propriétaire du Met ou du Louvre. JR est «un artiviste urbain». A savoir qu’il investit l’espace urbain, les rues du monde entier, ou plus simplement, le plein air pour en faire sa galerie de photo. Et ce, toujours avec l’idée que l’art est forcément chahuteur, nécessairement engagé. Cette vision ancrée dans l’espace peut-elle s’accorder, et avec bonheur, avec le terrain de jeu étalé par le grand Web? La réponse, il nous l’a donnée lors d’une interview. Extraits.

JR, on dit de vous que vous êtes un «artiviste urbain», à mi-chemin entre le street art et l’installation photographique. Sur votre site, vous déclarez posséder finalement « la galerie d’art la plus grande au monde ». J’imagine que pour faire de la rue et du monde sa galerie d’art, on a besoin d’aide. Est-ce que le Web va être une de ces aides ?

JR : Disons que c’est une aide, dans plusieurs sens. Le premier, c’est vraiment la continuité de l’œuvre en ligne. C’est-à-dire qu’elle existe, elle est éphémère dans la rue et que sa pérennité, la manière de la redécouvrir, la manière dont la plupart des gens en vrai vont la découvrir, sera sur le Web.
A chaque fois qu’il y a un collage dans la rue, il se crée quelque chose. Il y a une interaction avec les gens où souvent, il y a un questionnement quand les gens découvrent le collage un peu après. Et ces gens là nous retrouvent sur la toile et on discute. Cela créé une énorme communauté à travers le monde, qui nous suit en ligne à travers les sites, Facebook, etc.

Dans l’esprit collaboratif, j’ai vu que vous alliez même plus loin. Notamment, avec le projet Inside Out, lancé au printemps 2011. Vous invitiez alors les internautes à partager leurs photos, en une espèce d’énorme installation participative. Quelle était l’idée derrière?

L’idée d’Inside Out, c’est justement sur la base qu’à travers le monde, il y a des milliers de gens, voire des millions, qui veulent participer ou être impliqués d’une manière ou d’une autre ou me disent toujours : « Viens chez nous, il y aurait un projet incroyable à faire ici ».
J’ai décidé d’inverser le processus et de demander aux gens de faire un portrait. Je mets des règles précises, mais assez simples, finalement. Ils peuvent renvoyer ce portrait. Il y a même une appli Inside Out sur iPhone. On peut aller sur le site aussi et le faire directement sur le site insideoutproject.net. Les gens nous envoient leurs photos, on imprime ici à New York et on leur renvoie aux quatre coins du monde. S’ils n’ont pas les moyens de la payer, cela leur est offert par d’autres internautes. Ensuite, les gens décident de ce qu’ils veulent faire de leurs affiches en grand format. Cela vous donne des collages incroyables aux quatre coins du monde comme la frontière Mexique-Etats-Unis qui a été recouverte par des milliers de portraits il y a quelques semaines. Il y a trois jours, à Haïti, 500 Haïtiens ont collé dans tout Port-au-Prince pour les deux ans du séisme. Il y a vraiment des actions importantes et significatives qui se créent en fonction de la place de l’image dans la société dans laquelle les gens lancent le projet.

Mais est-ce dire que chacun peut être artiste ?

Non, je ne pense pas que chacun puisse être artiste. Je pense que quand on donne à chacun le même outil, c’est-à-dire cette feuille de papier avec sa photo dessus ou la photo de quelqu’un d’autre, en fonction de ce qu’il en fait, il devient artiste ou pas.
Je m’explique. S’il prend cette photo et qu’il l’affiche dans sa chambre ou dans son salon, quelque part il devient un collectionneur, il en fait une œuvre. S’il la prend et puis la jette à la poubelle, quelque part, cela fait de lui un consommateur. Si comme les Tunisiens il remplace le portrait du dictateur Ben Ali par leurs photos comme cela a été le cas en Tunisie pendant la révolution, à ce moment-là, cela fait d’eux des activistes. S’ils collent avec des amis en faisant une installation plastique dans la rue, à ce moment-là, cela fait de la personne un artiste. Mais vraiment, c’est la personne qui va décider de l’étiquette qu’elle se donne.

Podcast disponible ici

Crédits photos: (c) JR


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