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J'adore l'expression "temps libre". Comme s'il y avait un temps enchaîné. Le temps est libre par essence. Il est toujours en train de nous échapper. Moi, je ne suis pas libre, même si j'aime l'idée. Il y a toujours quelque chose, des facteurs ou des êtres extérieurs, qui influe sur mes gestes, mes pensées, mes humeurs. La liberté parfaite n'existe pas. Je suis les valeurs qu'on m'a inculquées. Je fais ce qui est correct, ou j'essaye de le faire, en fonction de ce qu'on m'a appris. Quelles issues pour mon être? Quels chemins pour mes pas? À quoi bon résister à la dictature de la masse? Il faut rester calme. Ne pas tomber dans le piège du désarroi. Ne pas laisser m'entraîner dans les affres de l'irraison.
Aujourd'hui, le ciel est d'un azur magnifique, pourtant mon coeur est gris. Je le dis sans amertume, c'est une constatation.
Je ne veux pas m'en remettre au passé, j'aime mon présent, mais l'avenir m'inquiète. Tout est si difficile et douloureux quand on se met à trop contempler la misère du monde. Il est tentant, et c'est ce que j'ai fait depuis tout petit, de se réfugier dans le monde des songes, dans le monde des arts. L'illusion dorlote mes sens, m'emplit d'une douceur et d'une sérénité agréables. Mais l'évasion est fugace, momentanée, virtuelle, et son efficacité dépend en grande partie d'un certain calfeutrage de l'âme, d'une certaine isolation de l'individu.
Ce qui est devenu impensable pour moi, j'ai ma famille, et elle est ma plus précieuse richesse.