Hester aime, puis s’ennuie, exige trop, et veut mourir. Terence Davies tient là l’héroïne british parfaite pour le drame qui va se jouer sous nos yeux. Bovarienne, dépressive, suicidaire, condamnée d’avance au malheur : elle est le centre de cette œuvre au côté rétro volontairement surligné. Dans une Angleterre de l’après-guerre, il nous plonge au sein d’un triangle amoureux cruel : un riche juge (Simon Russell Beale) aime Hester (Rachel Weisz), qui s’est entichée d’un ex-pilote de la Royal Air Force (Tom Hiddleston), qui ne lui rendra jamais la pareille. Son entier long-métrage repose sur l’impossibilité du personnage féminin à choisir entre l’ennui et le confort promis par le premier, une terrible passion non-réciproque avec le second.
Parce que l'héroïne se meut au cœur d’une atmosphère lourde et cotonneuse, la caméra suivra ce même élan neurasthénique, Davies adoptant le choix (radical ?) de ne rendre rien ni personne aimable. Ainsi sa mise en scène est-elle froide, embrumée, aussi morose que la jeune insatisfaite. Le cinéaste anglais, s’il poursuit une même logique (à la fois nostalgique et rebelle) d’un bout à l’autre, peine cependant à rendre sa peinture tragique vivante. On assiste alors perplexes à un déballage de sentiments comme autant de natures mortes, l’ensemble étant tristement figé dans un brouillard mélancolique tenace.