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[anthologie permanente] Nuno Júdice

Par Florence Trocmé

La revue Le Préau des collines publie un gros numéro consacré au peintre Denis Martin. Parmi les nombreuses contributeurs, le poète portugais Nuno Júdice.  
 
 
Arbeit macht frei 
Ils mettaient le train en marche quand l’heure 
arrivait. Voitures fermées, wagons attelés, 
le chemin était tout droit. Ils regardaient le paysage, 
le temps d’une distraction ; mais aussitôt ils recentraient 
leur attention sur les rails, plaisantant en changeant 
de place quand venait l’heure des repas. 
À chaque arrêt, ils buvaient au goulot ; et ne se rendaient 
même pas compte de ce qui se passait derrière eux ; c’était 
une destination lointaine, les arrêts étaient fréquents, et 
ils devaient les compenser par des heures supplémentaires 
afin d’accomplir leur horaire : les règlements sont des ordres, 
ils étaient attendus, et ce n’est qu’une fois la remise 
effectuée qu’ils pouvaient changer le sens de la machine 
et faire le chemin du retour, wagons vides 
et propres, et le tout avançant plus vite car 
il n’y avait plus de poids ralentissant la marche. Ainsi 
sont les bons fonctionnaires, des exécutants, 
et il n’y avait pas de préavis de grèves, de déviations, 
de questions sur ce qui remplissait les wagons. 
 
 
Nunu Júdice, in revue Le Préau des collines n° 13, traduction Cristina Isabel de Melo, p. 165.  
 
 
Arbeit macht frei 
Punham o comboio em marcha quando a hora 
chegava. Carruagens fechadas, vagões atrelados, 
o caminho era em frente. Olhavam a paisagem, 
quando se distraíam ; mas logo coltavam 
a atenção para os carris, gracejando ao trocarem 
de lugar quando chegava a hora das refeições. 
Nas paragens, bebiam pela garrafa ; e nem 
davam pelo que se passava atrás deles : estava 
longe o destino, as paragens eram muitas, e 
tinham de as compensar com horas extraordinárias 
para cumprir o horário: regulementos são ordens, 
estavam à sua espera, e só depois de feita 
a entrega podiam mudar o sentido da máquina 
e fazer o caminho de volta, vagões vazios 
e limpos, e tudo a andar mais depressa porque 
já não havia peso a atrasar a marcha. São 
assim os bons profissionais, cumpridores,  
e não há notícia de greves, desvios, 
perguntas sobre o que enchia os vagões.  
 
Nuno Júdice dans Poezibao
bio-bibliographie, ex. 1, ext. 2 


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