Voilà un restaurant qui réconciliera les couples en inversant le partage des tâches en cuisine comme dans l’atelier. On réserve dans ce panier de crabes pour les crustacés et les poissons ultra frais, pour l’ambiance d’auberge de port un peu bruyante et surtout pour le maillet en bois qui l’espace d’un dîner deviendra votre arme de service pour travaux pratiques gastronomiques. Le Crabe marteau, c’est un peu le Do It Yourself de l’écailler, le Monsieur Bricolage du plateau de fruits de mer, bref un concept ludique pour mangeurs un peu sadiques, mais surtout une très bonne alternative aux bancs iodés parisiens souvent hors de prix et finalement pas très funky.
Pimpante malouinière échouée dans le bas de la rue des Acacias, le Crabe marteau propose aux équipages de passage de décrocher leur pitance en se défoulant bruyamment sur des crustacés un peu passifs, victimes innocentes d’un touché coulé en eaux basses. Marteau-crabe-planche, l’effet poupée vaudou est immédiat et plutôt gratifiant puisque l’immobilisme de la bête fait de vous le vainqueur perpétuel de cette version bretonne du pierre-feuille-ciseaux. Ça tape, ça cogne, ça brise, on y met les mains et ça gicle un peu sur les voisins et sur les murs, mais bon… on a rien sans rien.
La carte s’affiche sur tableau noir comme à l’école. Pas la peine de se mettre martel en tête pour le choix limité à quelques formules simples mais efficaces qui mêlent en quantités variables huitres de pleine mer et crabes charnus, accompagnés de leur sceau de pommes de terre vapeur et de leur mayonnaise aux herbes. C’est simple, bon comme à la maison et rustico-rigolo. En dessert, du grand Breton encore avec un far aux pruneaux un peu solide et un Kouign Aman servi chaud qui ravira votre côté crabe honteux un peu lipidineux.
Le Crabe marteau, c’est sans doute aussi le seul restaurant de Paris où vous pourrez lire à table sans passer pour un rustre. Ici, Ouest France fait nappe tandis que d’autres bretonneries font tapisserie sous le regard bleuté de feu Eric Tabarly, un peu noyé sous les bibelots « Perros-Guirrec j’y étais », les filets de pêche au gros et les bouées SNSM.
Entre deux gobages d’ huitres, vous pourrez ainsi passer en revue les faits divers de l’été des Côtes d’Armor, repérer les coquilles dans le programme des expositions de vieux gréements et prendre connaissance de la météo des plages de la Côte de granit rose.
En sortant, l’imitation aidant, vous marcherez sans doute en crabe quelques instants, avant de vous échouer, ravis, dans votre panier à vous.
Où : 16, rue des Acacias, 75017 – 01 44 09 85 59
Quand : au retour de pêche, après votre virée au Bricorama d’Ivry, pour vous défouler après une mauvaise journée
Avec qui : une bricol’girl, un requin, un cancer ascendant cancer, un communiste et sa faucille
Dans votre Ipod : Si j’avais un marteau, Claude François
A vos pieds : des chaussures crabe