Après plus de 300 articles réalisés depuis 4 ans pour ce blog d’abord, puis Le (Huffington) Post puis Lefigaro.fr puis Le Plus du Nouvel Obs, je n’ai jamais écrit sur ma série préférée. Jamais, à part pour illustrer toute l’admiration que je voue à la chaîne AMC qui la produit. Cet acte manqué est un mystère absolu. Dont je n’ai pris conscience qu’en découvrant l’article de Rolling Stone publié il y a quelques jours et en profitant de vacances pour profiter de nouveau et en DVD de la saison 1.
Lorsque la série est arrivée début 2008, j’avoue avoir fait l’effort de la regarder pour comprendre ce que la chaîne qui avait lancé Mad Men l’année précédente pouvait nous proposer de différent. Parce que le pitch ne m’inspirait pas vraiment : un prof de chimie au coeur du nouveau Mexique, atteint d’un cancer, se lance dans la production de Crystal Meth pour gagner l’argent nécessaire à son traitement et subvenir aux besoins de sa famille. Et le casting qui laissait semblait jouer avec des clichés mal à propos, avec un quinqua au physique de loser et un jeune associé junkie beau gosse yeux bleus-dents blanches, n’ajoutait rien à l’envie.
Breaking Bad a immédiatement confirmé une réalité qui n’a cessé de se confirmer depuis : AMC a mieux compris que HBO ou Showtime que son statut de « chaîne cablée » lui permettait mieux que le politiquement incorrect de façade associant avec un systématisme stupide sexe et violence (Spartacus, Games of thrones, Rome…). Breaking Bad est amoral parce qu’il nous fait adhérer aux mauvais choix d’un personnage sans rien cacher des désastres qu’ils entrainent et en éteignant une à une toutes les circonstances atténuantes qui pouvaient légitimer ces mauvais choix.
Mais surtout, Breaking Bad propose mieux que de découvrir les dessous du monde de la drogue, pourtant détaillé par le menu dans toute son horreur. La série a d’ailleurs été accusée de montrer de façon un peu trop précise comment produire et consommer de la métamphétamine. La véritable promesse est de nous faire croire en l’improbable transformation d’un homme, par petite touche, chaque saison, au travers de scènes anodines ou de liaisons qui font monter un palier au personnage. Entouré d’une poignée de caractères jamais sous-traités, il nous impose de plonger avec lui et malgré eux dans une spirale infernale et irréversible.
Le numéro d’acteur exceptionnel que nous sert Bryan Cranston a déjà été mutli récompensé. Mais son acolyte mérite autant de louange, Aaron Paul nous offrant notamment l’une des scènes les plus émotionnelles de la série à la fin de la saison 2. Anna Gunn qui interprète la femme du « héros » est rayonnante de force et lumineuse même dans le désespoir, leur fils est interprété par RJ Mitte qui souffre tout comme son personnage d’infirmité motrice cérébrale et improvise des scènes de façon absolument incroyable. Dean Morris suit une autre spirale en tant qu’agent de la Drug Enforcement Administration avec une sensibilité inversement proportionnelle à son physique de cow boy mal dégrossi, pendant que sa femme dans la série, interprétée par Betsy Brandt, vacille de hauts en bas entre cleptomanie et gestion de son entourage qui s’effondre.
L’homme à vénérer pour ce bijou télévisuel est Vince Gilligan, créateur, producteur et ponctuellement scénariste de Breaking Bad. Principalement connu pour son rôle majeur de scénariste pour X Files, il y a puisé une inspiration qu’on retrouve dans certains épisodes, l’homme à la cigarette ayant même inspiré quelques scènes. Il avoue lui-même qu’AMC lui a permis de développer exactement la série qu’il avait en tête. Cet homme là est un génie.
Si vous avez la chance de ne pas avoir encore découvert Breaking Bad (diffusé en France sur Arte et disponible en DVD et Blu Ray surAmazon), vous arrivez au moment où la première partie de la 5ème et dernière saison est en cours de diffusion, la deuxième partie étant promise pour l’été prochain. Sachez que le véritable miracle de Breaking Bad est de proposer chaque année une saison meilleure que la précédente. Et à en croire Metacritique, la saison 5 est proche de la perfection en atteignant la note exceptionnelle de 98 sur 100 pour les critiques américains, juste devant… la saison 4. En ce qui me concerne, comme chaque année, j’attends la diffusion de tous les épisodes pour pouvoir en profiter d’un bloc, en un week-end, à la fin de l’été. Et ce fameux week-end, je ne serai là pour personne.