Sans âme - Le Protectorat de l'Ombrelle T.1, de Gail Carriger
Par Guixxx
@zeaphra
Certains résumés de livre ne sont
clairement pas attractifs. Celui du premier tome du Protectorat de l’Ombrelle,
par exemple. On dirait parfois que le but premier de l’éditeur/stagiaire ?
qui décide quoi écrire sur le quatrième de couverture se dit « okay les
mecs, alors déjà on va l’écrire genre simplement,
vous voyez ? Faut attirer les minettes qu’aime les crocs et le sexe, vous
voyez ? Alors je veux qu’on place les mots célibataire, beau, loup-garou
et écossais dans le résumé, que ça respire le désir, les phéromones et le
fantasme okay ? »
Bon, ben là c’est réussi, le
pauvre éditeur/stagiaire qui a eu à écrire le résumé de Sans âme a quand même tenté d’y mettre un peu d’humour, pour
relever le tout, mais malgré tout… ça sent l’arnaque de poulette.
Alors j’ai choisi de lire pour
deux raisons : d’une part parce que fût un temps j’étais une minette et même
aujourd’hui entre deux romans prise de tête j’aime toujours bien me détendre
avec de la lecture légère (oui, je confesse avoir lu Le journal de Bridget Jones et quelques autres chefs d’œuvre du même
acabit… et craquer sur True Blood
quand le dernier sort, même si au final je ne me souviens jamais des
intrigues), et d’autre part il était gratuit. (oui oui, je suis près de mes
sous parfois)
Il est certain que ça aurait pu
être pire. Le Protectorat de l’ombrelle
est une lecture qui a bien joué son rôle de distraction, et je dois bien avouer
que ce livre à un petit quelque chose en plus par rapport aux autres romans de
bit-lit, plus de finesse dans l’écriture, et plus d’originalité dans l’intrigue.
Alors bon, quoi que qu’est-ce ?, me demanderez-vous. Je vais donc vous
délivrer le quatrième de couverture proposé par Orbit, son éditeur, puisque je
viens d’en parler. Et puis au final, je ne pense pas faire beaucoup mieux qu’eux…
Alexia Tarabotti doit composer avec quelques contraintes sociales.
Primo, elle n’a pas d’âme. Deuxio, elle est toujours célibataire et fille d’un
père italien, mort. Tertio, elle vient de se faire grossièrement attaquer par
un vampire qui, défiant la plus élémentaire des politesses, ne lui avait pas
été présenté. Que faire ? Rien de bien, apparemment, car Alexia tue
accidentellement le vampire. Lord Maccon – beau et compliqué, Écossais et
loup-garou à ses heures – est envoyé par la reine Victoria pour enquêter sur
l’affaire. Des vampires indésirables s’en mêlent, d’autres disparaissent, et
tout le monde pense qu’Alexia est responsable. Découvrira-t-elle ce qui se
trame réellement dans la bonne société londonienne ? Qui sont vraiment ses
ennemis, et aiment-ils la tarte à la mélasse ?
Bien. Alors à la décharge de l’auteur,
Miss Gail Carriger, alias Tofa Borregaard
(moins sexy), il y a de l’idée dans cette nouvelle série de bit-lit. Car ce n’est
pas un roman de vampires et loups-garous habituel. Il se déroule sous le règne
de la Reine Victoria, dans une Angleterre où les créatures surnaturelles sont
reconnues et vivent comme des citoyens normaux. Le fait qu’ils soient peu nombreux
(la transformation est très difficile et peux d’humains y survivent) aide
notamment à leur insertion, ainsi qu’un système interne très développé. Notre « beau
et compliqué » Lord Maccon (qui n’a rien de compliqué, il est juste
écossais, parle avec un accent et dit des gros-mots, comme toute personne
normal) est le chef de la BUR, le bureau du registre des non-naturels, et s’occupe
de gérer les cas délicats concernant vampires, loups-garous et fantômes.
Mademoiselle Tarabotti, Alexia, notre fameuse héroïne, n’est pas une créature
surnaturelle. Néanmoins elle n’est pas tout à fait normale non plus. Elle est
ce qu’on appelle une « paranaturelle », et cet état serait expliqué
par ce qui définit le surnaturel dans cet univers : l’âme des hommes.
En effet l’auteur imagine que les
êtres surnaturels qui ont survécu à la transformation étaient des humains
possédant une âme très puissante et donc très résistante à la mort.
Contrairement à Alexia qui n’en a juste pas. Alors bon il n’y a pas grande
différence avec les autres j’ai envie de dire : elle est très
intelligente, et si au premier abord elle à l’air peu pétrit de morale, il s’avère
qu’en fait elle peut être amoureuse, éprouver de l’amitié, avoir des remords,
avoir peur, pousser des gueulantes, donc à partir de là je vous demande en quoi
consiste ne pas avoir d’âme, parce que je ne vois pas la subtilité.
Bref, elle n’a pas d’âme, c’est
un fait avéré, on le lui a dit, elle est une Sans-âme, ennemie naturelle des surnaturels, un simple contact
physique annule complètement leur condition de morts-vivants : les crocs
se rétractent, les poils retournent à la racine, et les instincts animaux s’éteignent.
Imaginez comme c’est dangereux pour nos braves amis suceurs de sang…
Bon, j’aime bien cette idée d’âme,
mais je ne la trouve pas assez bien
développée. Il y a bien des tentatives, le roman cite de nombreuses fois les
articles scientifiques de la Royal Society de Londres, Gail Carriger lâche quelques explications, mais moi, déjà, l’âme,
je trouve que c’est et ça restera un concept abstrait, et qu’à partir de là,
tout n’est que fiction (comme c’est beau). Donc si quelqu’un veut me dire
concrètement ce qu’il a pensé de cette utilisation de l’âme dans le roman, qu’il
n’hésite pas à m’en faire part je suis
toute ouïe.
Donc oui, de toute façon, nous
sommes dans une fiction. Une bonne fiction, avec tous les ingrédients. Des monstres,
une héroïne au tempérament de feu, et un meurtre.
Revenons sur l’héroïne parce qu’elle
est à la fois attachante et énervante quand on creuse un peu. D’une part, j’ai
aimé le désir de l’auteur de brandir son statut de vieille fille (26 ans et pas
mariée !), ses défauts physiques flagrants – enfin seulement pour les
amateurs de porcelaine anglaise puisqu’il s’agit juste d’un nez plus grand que
celui d‘un anglais, d’une chevelure noire et bouclée, d’une peau olive hérité
de son père italien, et de son décolleté impressionnant en adéquation avec son
postérieur bien rembourré : comprenez qu’elle ressemble plus à Monica
Bellucci qu’à Kate Moss -, son goût peu sûr pour la mode, et son caractère bien
trop ouvert, de quoi rebuter les hommes qui préfèrent une femme faible et sans
luette pour être tranquilles le soir en rentrant du boulot.
Mais Alexia Tarrabotti est drôle. Oui, elle est drôle, fait des
traits d’esprit, et à un cerveau. Elle lit, se cultive, et ça, ça change !
Et surtout, elle tue accidentellement un vampire, ce qui va la mettre dans une
position délicate : elle va devoir avoir à composer avec Lord Maccon,
malheureusement pour elle écossais, beau et compliqué. Il est en fait grand,
bourru, mal rasé, taillé en V, et à des instincts animaux qui lui confèrent une
aura sexuelle que ni vous ni moi ne comprenons, parce que bon, un loup c’est
beau mais où est le fantasme sexuel là-dedans ? C’est là que les fans de
Jacob et de loups-garous doivent intervenir dans les commentaires, j’attends
vos arguments^^.
Bon en fait c’est un de mes
principaux bémol au roman : l’histoire d’amour que l’on sent venir dès les
premières pages, les moments de pelotages intensifs un peu trop longs et
répétitifs (ça évite aux auteurs d’avoir à avouer leurs fantasmes sur
Doctissimo, il suffit d’en parler dans son roman ! D’autant plus que, oh,
coïncidence, l’héroïne ressemble physiquement trait pour trait à l’auteur qu’on
peut voir sous tous les angles en photo, étraaaaaaange)… mouais. Mais bon, il faut
composer avec.
Petite photo de l'auteur...
Ca, et le fait que l’intrigue est
un peu facile. J’ai compris le dénouement dès la fin de la première moitié du
livre, mais bon, certaines personnes m’ont dit avoir compris la fin de The Usual Suspect dès la moitié du film,
alors ça arrive même aux meilleurs
Bref, à lire pour de la détente,
c’est quand même bien écrit, Gail Carriger avoue en interview son amour pour
P.G. Wodehouse, Jane Austen et Durrell, et ça se ressent un peu. Le siècle
victorien est bien représenté, les interventions d’avancées scientifiques
telles qu’aéronefs voguant dans les cieux ajoutent un petit côté steampunk très
apprécié, et le sigle des méchants représenté par une pieuvre m’a bien fait
rire.