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Sur les rails, entre les lignes...

Par Theophile

Rails Je suis rentré dans une librairie-papèterie, il y a quelques jours.
Sur le comptoir j'ai vu un livre.
Le titre me rappelle un personnage de Mère Courage et ses enfants de Brecht.
Je le retourne et je lis, ce qu'on appelle "la 4ème de couv' ":
" J'ai quinze ans, je m'appelle Fatemeh mais je n'aime pas mon prénom. Je vais être pendue bientôt... "
J'avale ma salive. La violence de cette phrase me donne le tournis.
Alors je passe en caisse.
Je rentre chez moi.
Je fais deux trois trucs.
Puis j'ouvre le livre.
Je le lis. Le dévore.
Puis je vois que je le terminerai bientôt. Très vite.
A ce moment du récit, je ne sais toujours pas pourquoi Fatemeh est en prison et condamnée à mort par pendaison.
Je le referme.
J'ai peur de le finir.
J'ai peur de savoir.
Deux jours se passent.
Un matin, je prends le TGV.
J'en ai pour deux heures de voyage.
Une jeune femme s'assoit à mes côtés.

    - Je suis côté fenêtre. Si vous le voulez bien je veux bien prendre côté couloir, je vais me lever plusieurs fois je pense.
    - D'accord bien sûr.

Djavann
Elle est très belle. Une jeune femme. C'est étrange, elle ressemble étrangement. Etrangement à la photo qu'il y a sur la quatrième de couverture du livre qui me fait peur.
Je le sors. Je regarde.
Oui la ressemblance est frappante. Mais ce n'est pas elle. Ce n'est pas Chahdortt Djavann qui s'est assise à mes côtés. Mais une femme. Plus jeune qui lui ressemble.
Le TGV démarre. J'ai le livre entre les mains.

Je le fini.

Otage. Je pleure. Je ne peux retenir mes larmes à la fin de ce livre. Pris en otage. Ma voisine qui ressemble à Chahdortt Djavann a les yeux fermés. Un casque sur les oreilles. Elle dort sans doute.
Otage, je reste. J'ai le reste d'un mouchoir. Je m'en accommode.

Le train entre en gare. Je dois descendre.
Visiblement, ma voisine continue et descendra à la prochaine gare.
Je me lève, elle me laisse passer.
Je met ma veste. Récupère ma valise.

    - Excusez-moi, c'est un peu incongru de vous demander. Mais... c'est le nouveau livre de Chahdortt Djavann qui vous a fais pleurer ?
    - Oui.
    - Il est bien ?

    - C'est une histoire vraie. Elle n'a pas écrit, elle a juste fait traduire l'original du journal de cette fille de quinze ans rédigé en prison.
J'ai pleuré, oui. C'est dur.
    - Je le lirai alors.

    - Préparez-vos mouchoirs...

    - Je suis iranienne.

Je suis resté très troublé. Je n'ai rien dis. J'ai seulement acquiescé de mes yeux une compréhension devenue apparemment mutuelle. Elle m'a fait un large sourire magnifique. Dans nos yeux nous nous sommes dis au revoir.

La_muette_2

Je suis descendu du train. Chargé de bagages. Plusieurs maintenant.
Sur le quai de la gare, à nouveau, je me suis mis à pleurer.


La muette
,
Chahdortt Djavann (éditions Flammarion)


Bannirefestivalromans2


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