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Amours chiennes

Par Borokoff

A propos de Wrong de Quentin Dupieux ★★☆☆☆

Jack Plotnick - Wrong de Quentin Dupieux - Borokoff / blog de critique cinéma

Jack Plotnick

Dans une petite ville des États-Unis, Dolph se réveille un matin sans retrouver son chien. Triste et inquiet, il se rend quand même à son travail, une agence de voyages de laquelle il a été viré 3 mois plus tôt. Mais dès le lendemain, incapable de vivre sans son chien, Dolph décide de consacrer ses journées à enquêter sérieusement sur sa disparition mystérieuse. Ce qui l’amène à rencontrer le non moins mystérieux Master Chang…

D’emblée, le personnage de Dolph (Jack Plotnick, faux-air de Sean Penn) fait penser, par son air ahuri et sa volumineuse masse de cheveux dressés sur la tête, au héros d’Eraserhead (Lynch, 1977).

Ce ne sera pas la première fois ni la dernière que l’on pensera au réalisateur de Blue Velvet ou encore de Mulholland Drive dans Wrong. Les références aux films et à l’univers de Lynch abondent en effet dans le quatrième long-métrage du réalisateur de Steak (2007), les deux hommes partageant sans doute le même goût pour le bizarre et l’irrationnel.

Dupieux est un touche-à-tout de talent. À la fois metteur en scène, dessinateur de B.D., DJ (connu sous le nom de Mr. Oizo)  et compositeur, il signe la B.O. et le scénario de Wrong. Mais si Dupieux a des points communs avec Lynch, l’ambiance de ses films est beaucoup moins sombre et la narration plus linéaire (moins déconstruite).

Jack Plotnick - Wrong de Quentin Dupieux - Borokoff / blog de critique cinéma

Dans Wrong surtout, le ton reste d’abord et surtout celui d’une comédie pleine d’absurde et de personnages décalés, étranges et loufoques comme ce jardinier à l’accent français à couper au couteau joué par Eric Judor (tous les autres acteurs sont américains) ou cette jeune nymphomane travaillant dans une pizzéria et qui confond Dolph avec… son jardinier justement !

Plongée dans la psyché d’un quadragénaire tourmenté, Wrong s’apparente à une pochade surréaliste et grinçante,une farce pleine d’incongru et de déconvenues pour un héros perdu dans la toile de son cerveau, et qui semble confondre ses rêves, ses projections mentales avec la réalité. Si tous les personnages du film font tranquillement intrusion – ce qui a le don de le rendre deux fois plus inquiet – dans le cerveau de Doph, c’est parce qu’ils connaissent par cœur l’agenda de sa vie et les évènements qui l’attendent, comme par exemple l’heure de ses rendez-vous avec Master Chang (William Fichtner), suspect principal dans la disparition du chien.

Au début du film, le voisin de Doph lui annonce qu’il en a marre de cette vie et qu’il a décidé de déménager, n’emportant avec lui que deux valises et sa voiture. Au passage, ce même voisin ne se prive pas de lui faire la morale en reprochant à Dolph son laisser-aller voire son côté pervers, Dolph traînant dans la rue et devant chez lui en robe de chambre ! Les deux hommes resteront néanmoins amis.

La suite est tout aussi rocambolesque et n’importe quoi, comme dans cette scène ou le jardinier joué par Judor annonce à Dolph que son palmier a disparu et qu’à la place a poussé un sapin !

Si on a comparé Dupieux à Lynch, il semble que les emprunts du réalisateur français à l’auteur de Lost Highway comme cette intrigue sur fond de plongée dans le cerveau labyrinthique d’un personnage pour le moins perturbé pour ne pas dire complètement paumé (avant la disparition du chien déjà) soient davantage un prétexte pour raconter tout autre chose, un leurre et une fausse piste parfaits.

Car ce qui anime Wrong, ce qui apparaît bientôt comme un enjeu et un rouage intrinsèques dans le film, c’est la manière jubilatoire avec laquelle Dupieux joue sur les codes de la télévision (un peu à la manière de Forgeard), et la façon dont il tourne en dérision les stéréotypes de la communication tels que la télévision les a développés et exacerbés.

Le seul problème du film, au-delà des qualités précédemment citées et de sa galerie de personnages à la fois hétéroclites et hauts en couleurs, c’est qu’il tire en longueur, trop de péripéties finissant par tuer la péripétie. Wrong n’aurait-il pas gagné en intensité dramatique (c’est quand même l’histoire d’amour entre un maître et son chien !) et en potentiel comique en ne durant qu’une demi-heure voire en n’étant qu’un court-métrage ?…

http://www.youtube.com/watch?v=1S_DzaK_RPE

Scénario de Quentin Dupieux : 

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Mise en scène : 

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½
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Acteurs : 

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Dialogues : 

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Compositions de Quentin Dupieux et David Sztanke : 

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