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"God Bless America", le film choc (non primé) du 38° festival du cinéma américain de Deauville

Par Vierasouto

Pitch.
Un quadragénaire solitaire, divorcé, très malade, renvoyé de son travail, passe à l'acte et assassine toutes les personnes les plus viles qui lui ont gâché la vie et celle de l'Amérique depuis des années.

Sur le ton de la comédie, le réalisateur tape là où ça fait mal, et rien ne lui échappe de la sous-culture et des anti-valeurs qui régissent les médias américains, leurs stars et leurs spectateurs (en France, on n'en est pas loin). Accablé par son zapping télé, passant d'une pub débile à une émission genre "American idol" ("Nouvelle star") où on se moque d'un gamin demeuré, en passant par un film violent, un film porno, et l'arrogance des présentateurs, Frank commence par se rebiffer au bureau, offusqué qu'on utilise ce candidat chanteur débile comme un phénomène de foire pour faire de l'audience. Mais, pour avoir offert des fleurs et un livre à la réceptionniste, Frank est bientôt viré pour harcèlement sexuel. Divorcé, la fille de Frank refuse de le voir durant les WE, la gamine odieuse, hurlant qu'elle déteste sa mère quand elle lui offre un Blackberry au lieu d'un Iphone. Odieuse, la star de la TV Réalité, genre
Kim Kardashian version blonde, qui pique une crise de nerf quand ses richissimes parents lui offrent pour son anniversaire une voiture de sport qu'elle n'aime pas. Son ex-femme lui annonce qu'elle compte se remarier, son médecin qu'il est condamné (la scène avec le médecin gueulant tenant à bout de bras un écran d'ordinateur avec la tumeur au cerveau de Frank tandis que son vendeur de voiture lui téléphone est très convaincante), son employeur l'a renvoyé. N'ayant plus rien à perdre, Frank passe à l'acte et va tirer sur tous les symboles de la société du spectacle qui ronge son pays.
La première victime de Frank sera Chloé, la bimbo vedette d'une émission TV réalité filmant sa vie, qu'il abat dans sa voiture, dans l'intervalle, il a rencontré Roxy, une ado fugueuse avec qui il singe "Bonnie and Clyde" et le final sera le pastiche du film culte. L'expédition "punitive" de Frank et Roxy va crescendo dans la violence, au cinéma, un groupe, dont une écervelée pendue à son mobile, déclenche une tuerie, etc... Les médias d'information ne sont pas épargnés, relayant la bêtise et la vulgarité en en rajoutant une couche, interprétant les assassinats à la lumière de clichés éculés.

photo Potemkine
On est d'accord avec le message du film à 200%, tout est finement observé, mine de rien, sous la comédie dilatée, outrée ; en présentant le film, le réalisateur a prévenu les réactions, son film est très violent mais aussi une ode à la gentillesse. Frank cherche tout le long du film un geste de bonté, de solidarité, de générosité, atterré par l'effondrement des valeurs humaines au profit du profit marchand et du star-system généralisé, dévoyé, où tout ce qui n'est pas enregistré afin d'être montré sur un écran, TV, internet, téléphone, n'a plus aucun intérêt à être vécu. En Bonus, Alice Cooper, la première tuerie sur "School's out", Alice Cooper que vénère Roxy qu'elle considère comme l'ancêtre du punk et le premier à rocker à avoir théatralisé la violence dans ses shows.
Bien entendu, comme l'avait prévu le réalisateur, on peut le taxer d'utiliser la violence pour dénoncer la violence mais c'est bien en aval qu'il tente de faire passer un message de "ré-humanisation" des relations sociales. Le film a un peu le même sujet que "Chute libre" de Schumacher où Michael Douglas pétait les plombs quand, en bout de la chaîne des frustrations quotidiennes, le Mac Do du coin refusait de servir son breakfeast pour quelques minutes de retard sur l'horaire en vertu du règlement interne du self. Cependant, là où "Chute libre" (un film à voir) était plutôt un parcours individuel, auquel on pouvait néanmoins aisément s'identifier, dans "God bless America", le sujet est beaucoup plus vaste, universel, s'appliquant à sous-culture et la déification de la célébrité, à la perversion généralisée des valeurs, des tous les pays dits civilisés.

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