Jean-Claude Schneider, poète et traducteur de poésie
allemande (Kleist, Hölderlin, Hofmannsthal, Trakl, Walser) et russe
(Mandelstam), publie Là qui reste, aux
éditions fissile
soif sous leurs pas
Toute œuvre humaine doit naître de la pénombre
et
de l’aveuglement, doit donc demeurer dissonante.
Hermann Broch, La Mort de Virgile
ils
levés
pour la salutation du jour
face au vent d’autant plus acéré que
déjà comptés
leurs pas qui tremblent dans la poignée d’heure
s’éloignant
ruminent
l’éblouissement d’ici
du lieu de leurs furies
s’ébat se gave à se ronger les paupières
leur regard
(longue l’ombre et goût de cendre la nourriture)
referme sa vorace parenthèse
question « quoi
fait ? »
rien
qu’accroché tressé à l’air
quelques sillons de charrue mentale (lignes
se rejoindre à l’∞)
froissant des draps qu’elle rêve ressemblants
courbés
cous
une somme un tas
de —
auraient dû être respirés adulés
et ne l’ayant été
quelle
mordacité dans la chair
dans quoi enveloppe un moment distraits de
l’errance ils s’engouffrent
langue fongueuse fongeuse
pour l’inévacuable
ça
l’adieu
aux lalies amébées de lumière et d’eau
Dans la poussière de devant la porte
ils puisent
ces heurtées d’élytres
à dire
pire
futurs éclats de vers sur
dehors sur le crissant aujourd’hui
ils
hérissent
la langue cassée
aimant que
saigne
la hache souffle
que giclent d’hétéroclites caillots
de là où s’étrangle
ils
pronom devenu
nom commun bougeante chose
aux vois exemplairement
fissurées
tenant
comme un raisin dans le soleil pourpre
la terre
ils regardent
boitent la colline
écriture d’insecte leurs pas
à lentes strophes conversent bouches
sculptant le récitatif
qui
les entendra ?
Jean-Claude Schneider, Là qui reste,
éditions fissile, 2012, pp. 69 à 76
Jean-Claude Schneider dans Poezibao
bio-bibliographie, extrait 1, Corde (parution)
; Leçons de lumière (note de lecture M. Ohrti), ext. 2