L’Angleterre des Clash et de Ken Loach. L’Angleterre des années Thatcher. Loin des festivités de la famille royale, c’est bien l’Angleterre des exclus que Chris Killip s’est permis de photographier. Celle qui avait permis en 1988 à son second livre « In Flagrante » de dénoncer la politique menée par la Iron Lady. D’un père édenté portant son enfant sur les épaules à des jeunes marins pêcheurs ivres morts un dimanche matin… les laissés-pour-compte de Chris Killip occupent les deux étages du Bal jusqu’au 19 août. Comme une confrontation avec le réel, ce bal des exclus frappe et ramène le spectateur à cette Angleterre profonde des années 70-90. Révéler intimement ce qu’il s’est vraiment passé, telle est l’ambition de celui qui n’a jamais voulu être un photographe documentaire comme les autres.
Pendant 20 ans, Chris Killip s’est immergé dans les communautés de Skinningrove, d’Hudderfield et de Lynemouth. Des baraques à vendre aux plages crasseuses face aux visages déchus et abandonnés, c’est de cette époque chaotique qu’il s’agit, ce No future pris en flagrant délit. Son travail en dit plus long que n’importe quel livre d’Histoire. Ses photos en noir et blanc font l’effet d’une douche froide. Elles ne prennent jamais un ton accusateur mais se contentent d’être là. C’est brute mais authentique. Chroniqueur de la désindustrialisation, le photographe a su brosser le portrait d’une époque, d’un pays et à l’immortaliser. « Un temps détraqué, celui des ruptures de la modernité. Le temps de l’Histoire telle qu’elle est vécue de l’intérieur, et non telle qu’elle est écrite », disait l’écrivain David Campany. Un temps au final encore bien d’actualité !