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Trintignant : "Je suis un fou qui se contrôle"

Par Cineblogywood @Cineblogywood

Artistes : De la même génération que les Marielle, Rich, Rochefort et Noiret, Jean-Louis Trintignant a longtemps laissé une image un peu palotte, floue, sans aspérités. Mais ça, c’était dans les années 60-70. Avant que le monsieur, tout en se considérant un peu paresseux, ne passe à la mise en scène, et livre 2 films complètement barrés, inclassables, et invisibles depuis trop longtemps : Une journée bien remplie et Le maître-nageur. Au mitan des années 70, il entame alors une carrière d’acteur totalement libre, solitaire, où derrière son masque de gendre idéal se révèle peu à peu la figure d’un homme complexe, ambigu, misanthrope, aux limites de la folie. "Je suis un fou qui se contrôle", lâche-t-il d’ailleurs un jour.
Sorti d’une retraite de 10 ans, il effectue un come-back éblouissant dans le dernier Haneke, Amour, Palme d’Or au dernier Festival de Cannes. A cette occasion, la Cinémathèque propose une rétrospective de la carrière de l’acteur en 50 films. Occasion de vérifier que Jean-Louis Trintignant, ce n’est pas seulement une voix, mais aussi une carrière riche et précieuse, instantanés d’une douce folie ordinaire. Zoom en 10 films.
  1959 : Eté violent de Valerio Zurlini : chronique de l’été 43, au moment où s’effondre le fascisme. JLT sort tout juste du scandale Et Dieu créa la femme.
1962 : Le Fanfaron de Dino Risi : un triomphe en Italie. Face à un ENORME Gassman, il remplace au pied levé Jacques Perrin, pour une virée automobile sur les routes d’Italie un week-end de 15 août.
1968 : Le Grand Silence de Sergio Corbucci : incursion de JLT dans un western-spaghetti baroque et onirique. Il y joue un rôle totalement muet, paysages enneigés, face à Klaus Kinski. Culte. Projection qui sera suivie d’un dialogue avec l’acteur le 14 octobre prochain.

1970 : Le Conformiste de Bernardo Bertolucci. L’ascension d’un fasciste ordinaire, dans les années 30, d’après Moravia. Rôle douloureux, prestation impeccable et inquiétante. Fabuleuse lumière de Vittorio Storaro. "C’est sans doute ce que j’ai fait de mieux au cinéma", déclara l’acteur.

1975 : Flic Story, de Jacques Deray : face à Alain Delon en commissaire Borniche, il incarne le tueur psychopathe Emile Buisson. Froid comme la mort, Trintignant impressionne.
1979 : La Terrasse d’Ettore Scola : film choral italien par excellence, bilan idéologique des 70’s avant inventaire des 80’s. Un peu bavard, mais tellement intelligent ! Edition DVD française indigente.
1979 : Repérages, de Michel Soutter. Dans le rôle d’un metteur en scène qui monte 3 sœurs de Tchekov, il se trouve face à 3 caractères féminins : Delphine Seyrig, Valérie Mairesse – mais oui ! – et Léa Massari.
1979 : L’Argent des Autres, de Christian de Chalonge : une fable kafkaïenne sur l’argent, les banques et les compromissions. Fabuleux duo Serrault-Trintignant.
1984 : Under Fire, de Roger Spotiswoode : situé en plein conflit du Nicaragua, un fabuleux film drame de guerre journalistique. Trintignant y joue un rôle trouble dans la peau d’un homme d’affaires exilé compromis auprès de toutes les parties en guerre.
1997 : Ceux qui m’aiment prendront le train de Patrice Chéreau : dans un double rôle, il incarne le grand absent, le grand maître, et son frère jumeau. Une figure inspirée du père de Chéreau. Il y est impérial.
Bien sûr, il aurait rajouter Rouge, Regarde les hommes tomber, Le Bon plaisir, Un homme et une femme, Vivement dimanche, Eaux profondes, Malevil ou La Course du lièvre à travers les champs, pour rendre compte de la richesse de sa carrière. Une seule chose à faire : tous à la Cinémathèque !
Travis Bickle

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