La piste des exploits… et de la honte !
Après un one-shot sur le tour de France dans les années 1910 (L’Aigle sans orteils) et un diptyque sur le Paris-Roubaix dans les années 1920 (Pain d’Alouette), Christian Lax termine sa trilogie dédiée au vélo avec l’Ecureuil du Vel’d’Hiv, un récit dédié au vélo sur piste durant la Seconde Guerre mondiale.
Le Vel d’Hiv (le vélodrome d’Hiver à Paris) est donc au centre de ce one-shot, en tant qu’endroit mythique pour la pratique du sport, mais également en tant que théâtre de l’une des pages les plus sombres de la guerre 40-45. C’est au Vel d’Hiv, du 16 au 17 juillet 1942, sous le régime de Vichy, qu’eu lieu la plus grande arrestation massive de Juifs réalisée en France pendant la Seconde Guerre mondiale : près de 30.000 hommes, femmes et enfants furent arrêtés, internés et déportés vers des camps de concentration.
Le vélo n’est donc qu’un prétexte pour s’attarder sur la vie quotidienne à Paris sous l’occupation allemande. Christian Lax brosse ainsi le portrait d’une famille de l’époque : Serge Ancelin, le père, joueur de poker invétéré et plutôt collabo. La mère qui aide clandestinement les Juifs persécutés et dont on regrette que la destinée soit trop brièvement évoquée. Sam, le fils aîné champion de cyclisme, surnommé l’Écureuil du Vel’ d’Hiv et la grande fierté de son père. Eddie, le deuxième fils, dédaigné par son paternel du fait de son infirmité et signant ses articles de presse antinazis sous le pseudonyme de “L’écureuil”, en témoignage de son amour fraternel. C’est à travers le quotidien de la famille Ancelin, que l’auteur restitue toute l’ambigüité de l’époque, tout en abordant les exploits sportifs du Vel d’Hiv.
Visuellement, Christian Lax parvient à donner vie à cette page de l’histoire du cyclisme et de la France avec beaucoup de réalisme. Ce dessin, alliant dynamisme et charge émotionnelle, est admirablement rehaussé par une colorisation toute en douceur, qui renvoie immédiatement le lecteur dans les années 40.
Un témoignage réussi et une histoire profondément humaine !