Expositions du 27 octobre 16 décembre 2012
http://www.centre-photo-lectoure.fr/
Vernissage de l’exposition le samedi 27 octobre 2012 à 11 h.
Face à la vérité du réel tout n’est que traces, et seule leur accumulation parvient parfois à la refabriquer… un peu, plus ou moins.
Sur les deux étages du Centre d’art et photographie, l’exposition se déploie en plusieurs ensembles. Des images en noir et blanc collées à même le mur, se répondent en un double alignement en mélangeant les époques et les sujets. Images de voyages, de mort, d’amitié, d’architectures… Elles déroulent le long fleuve de la vie, sans chronologie et sans hiérarchie. Simple accumulation de traces parmi lesquelles se glissent quelques phrases choisies dans les nombreux ouvrages de Bernard Dufour et qui éclairent sa position d’artiste et son rapport à la photographie.
Cette longue portée d’images est interrompue par un bloc concentré de Modèles : ensemble de vingt photographies argentiques
encadrées des jeunes femmes qui ont été peintes ou/et dessinées par Bernard Dufour dans les tableaux des années 60 à 80.Un grand panneau rassemble des natures mortes extraites de la plus récente série de photographies numériques. Réalisées depuis la table de la salle à manger, elles constituent un inventaire du quotidien qui s’égrène au gré des repas et de la succession des jours. Elles soulignent les qualités de coloriste de Bernard Dufour et sa solitude précieuse et assumée, hors du brouhaha du monde, devant le spectacle d’un univers précisément habité, celui de sa maison du Pradier, où il a choisi de vivre exclusivement depuis 1975.
Des clichés-verre, qui lient le dessin à un procédé de gravure photosensible, prolongent le voyage dans la couleur bleue obtenue selon la technique du cyanotype. Ce sont des images de Laure, dernière femme aimée. Les manipulations chimiques nécessaires et l’exposition au soleil concourent à faire de ces clichés des objets énigmatiques.
Sur un autre mur, un jeu de planches-contacts présente à une échelle autre, un concentré de temps et de mémoire comme Bernard Dufour aime à considérer la photographie.Lors de ses voyages et transports amoureux entre le Pradier et Paris, il a expérimenté des protocoles aléatoires : faire une image toutes les 5 minutes, par exemple, pendant une partie du trajet. Il s’agissait d’éprouver la confiance pure et simple en la technique et sa capacité à produire des images sans objet qui accusent le fil du temps, comme des images épiques du peu.
Rebondissant sur ce concept, une salle rassemble des diptyques, seules toiles peintes de l’exposition, articulées à des images photographiques. Appelée série des Blowup, en référence au film d’Antonioni (1966), les toiles intègrent un motif photographique non-vu au moment de la prise de vue mais repéré au tirage par l’auteur. Ce non-vu – que Barthes nommera punctum – devient le sujet de l’image, puis de la toile.
Martine me photographie est le titre d’une petite photographie et d’une grande toile incontournable, qui fait figure de totem pour cette exposition. Elle jouxte la photographie d’un grand nu de Martine, image emblématique de la femme aimée. Ce nu sexué évoque la magie de la capture et de la prise de possession quand le risque de la perte harcèle le photographe amoureux. Ne voyez ici aucune intention de provocation : cette seule image sexuée présentée dans l’exposition est un poème d’amour infini.
La série des Photos noires rassemble des photographies de modèles nus, dont Bernard Dufour a voulu annuler l’identité. Il a donc fait monter le noir sur les visages et le regard de ces femmes modèles et amantes, renforçant du coup la charge d’émotion que possède pour lui un corps de femme, un corps réduit à lui-même. […] Il n’y avait plus ni beauté, ni laideur, ni désir, ni dégoût, mais un charme extraordinaire puissant, dit-il.
L’image d’une dépouille clôt cette salle : celle d’un renard pendu par des chasseurs, selon un antique usage, et rencontré par Bernard – lui-même chassant –
dans les bois autour de la maison dans les années 60. Image noire, terrible et terriblement forte, qui renvoie à l’incontournable et révoltante issue de toute vie et qui fait dire à Bernard Dufour :[…] Il n’y a pas de figure interdite ; et c’est sur ce point, ce seul point, que la photographie tout d’un coup annule le vieux monde.
La photographie nous maintient tous… dans une effervescence très agitée de rêves, d’utopies, de projections, de passions et de travail.
Commissaire de l’exposition :
Martine Michard, directrice de la Maison des arts Georges Pompidou à Cajarc.
Centre d’art et photographie de Lectoure , Maison St Louis
Maison de Saint-Louis – 8 Cours Gambetta 32700 Lectoure – 05 62 68 83 72
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