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Michael Haneke, cinéaste de l’émotion

Publié le 27 octobre 2012 par Tempscritiques @tournezcoupez
Michael Haneke, cinéaste de l’émotion

Michael Haneke, deux fois palmé d’or à Cannes

Depuis quelques temps, j’ai la fâcheuse tendance d’être au bord des limites de l’idolâtrie cinématographique. Enfin, c’est surement ce que perçoit les gens qui me lisent ou me côtoient. Il faut dire que depuis le dernier festival de Cannes, je vis avec Michael Haneke, je mange avec Michael Haneke et je dors même avec Haneke. Je rêve même de Michael Haneke. C’est dire si l’influence Hanekienne est forte. Mais il faut reconnaître que le cinéma de l’autrichien est y pour beaucoup. Alors que cette semaine sort (enfin !) son fabuleux Amour (qui lui valait une deuxième palme d’or après Le Ruban Blanc), l’envie soudaine était de créer un article sur la filmographie de ce grand cinéaste. Voici donc quelques films a revoir dans sa filmographie.

Des fois que vous auriez envie d’arrêter de lire le présent article, et donc pour ne pas risquer de vous faire passer à côté d’un grand film, j’évoquerai en premier Amour. En premier, pour finalement vous pousser à aller dans votre salle de cinéma découvrir cette incroyable oeuvre, remplie de douceur, mais à la fois dure et honnête. Ce serait un parfait péché cinématographique de ne pas aller le découvrir. Maintenant que j’ai essayé de faire rentrer habilement le message dans votre cerveau, je peux continuer, espérant que vous lirez tout de même la suite. Car si l’on est adeptes des expériences non conventionnelles en matière de cinéma, c’est bien par celui de Michael Haneke que l’on pourrait commencer. Chacun de ses films cache une idée, une réalité refoulée, ou un mal-être persistant.

Michael Haneke, cinéaste de l’émotion

C’est le cas d’ailleurs de son premier film, purement autrichien, baptisé Le Septième Continent. L’idée est de prendre une famille (bourgeoise de préférence), de lui accoler une vie monotone et franchement terriblement ennuyeuse, et de faire ressortir dans la froideur la plus absolue, leur méprise de la vie. Ajoutez à ça une télévision tournant à plein régime et des médicaments effervescents et vous obtiendrez un suicide quasi-collectif, complètement gratuit. Une vision finalement pessimiste (peut-être qu’Haneke me bannirait pour avoir utilisé ce terme) de la vie bourgeoise autrichienne. Une vie menée de petits luxes et où domine l’absence de communication.

C’est justement en évoquant ce manque de communication, qu’il serait judicieux d’aborder le deuxième film du cinéaste, associé de près à son premier, ainsi qu’au suivant, le troisième. En effet, Le Septième Continent, Benny’s Video et 71 Fragments forment ce que Michael Haneke appelle la trilogie de la glaciation émotionnelle. Dans Benny’s Video, il détruit (encore) la vie d’une famille aisée. A travers les vidéos passant en boucle sur sa télévision, Benny finit par considérer sa propre existence comme une simple vidéo. Une existence où tout est permi, tout est réalisable (c’est le jeu de la vie) et où les actes de violences ne sont finalement pas si grave et peuvent être dissimulés si on s’y prends bien. Haneke commence déjà à lutter contre un thème qui lui est cher : la déréalisation de la violence dans les médias. Rien n’est donc montré à l’écran explicitement, mais tout est parfaitement mis en oeuvre pour rendre le spectateur mal à l’aise. Haneke s’amuse alors avec les hors-champs et fait de sa caméra un formidable outil.

Michael Haneke, cinéaste de l’émotion

C’est en 1997 que Michael Haneke présente à Cannes Funny Games. Le film a soulevé le débat et a même choqué le public Cannois. L’histoire qu’a écrit Haneke est particulièrement amorale. Elle dépeint deux jeunes prenant entière possession de la vie d’une famille. Une torture psychologique ayant pour but de gâcher le plaisir et la soif de violence du spectateur. Pensant qu’avec des acteurs américains le film connaîtrait un plus grand succès et qu’il toucherait plus de monde, il réalise son propre remake, avec Naomi Watts, Tim Roth et Michael Pitt. C’est un échec et Haneke regrette finalement d’avoir fait le film. Les spectateurs ayant vu d’avance que Funny Games U.S. (la version américaine) ne serait pas ce à quoi ils s’attendaient, c’est à dire un film de violence gratuite, ils l’ont en quelques sortes boudé.

C’est en 2000, qu’Haneke revient à Cannes. La Pianiste remporte alors trois prix. Prix de la meilleure interprétation masculine et féminine pour Benoît Magimel et Isabelle Huppert, et Grand Prix pour Haneke. C’est la révélation. Haneke est alors inscrit à titre officiel dans la cour des grands, même si ses premiers films l’avaient déjà prouvé.

Haneke se plaît désormais en France. Après La Pianiste, il y tourne ses prochains films : Code Inconnu et Le Temps du Loup. Code Inconnu est plutôt bien reçu par la critique. Le Temps du Loup moins. Et puis vient  Caché, un des films ayant initié l’admiration de Jean-Louis Trintignant (à l’affiche d’Amour, comme je ne vous l’apprends pas) pour le travail de Michael Haneke. Il s’agit d’un thriller hypnotique sur fond de guerre d’Algérie, où le thème de la vérité est exploré. Les médias nous disent-ils tout ? C’est aussi sur ça qu’interroge le film. La presse l’acclame, mais les spectateurs nettement moins. Le film repart tout de même avec les honneurs de Cannes et décroche le prix de la mise en scène.

Michael Haneke, cinéaste de l’émotion

Il ne manque donc plus que la palme d’or à Haneke. C’est en 2009 qu’il peut se montrer fier et enfin la brandir. Le Ruban Blanc est consacré meilleur film par Isabelle Huppert et son jury. Une polémique est toutefois créée. Isabelle Huppert aurait-elle de trop influencé le jury pour qu’Haneke reçoive la récompense, lui qui lui avait valu auparavant un prix d’interprétation ? Quoiqu’il en soit, le film plaît.

La suite, vous la connaissez. Haneke décroche sa deuxième palme d’or. Les cinéphiles sont sous le charme d‘Amour et de cette histoire sentimentale sans mièvrerie. Alors, puisque vous avez tenu jusqu’à la fin de cet article, j’en profite pour vous le répéter : voyez Amour et bon film.


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