Fäviken Magasinet restaurant Magnus Nilsson par Patrick Faus
: cuisine banale
: cuisine d’un bon niveau
: cuisine intéressante et gourmande
: cuisine de haut niveau… à tous les niveaux
: cuisine exceptionnelle
Un repas chez lui est un rituel presque mystique…
Au milieu de nulle part. Les anglais disent « in the middle of nowhere ». Magnus Nilsson est là. Comme un bûcheron (il en a un peu le look) dans sa forêt. Son restaurant est une ancienne ferme des plus rustique dont il a gardé l’esprit en améliorant considérablement le confort et le décor intérieur qui reste cependant marqué par le bois du sol au plafond. Des peaux un peu partout, des fourrures qui pendent, un rez-de-chaussée pour la réception et le premier étage pour le restaurant où pendent des jambons et des morceaux de porc qui sèchent dans la salle. Les serveurs ont une tenue un peu monacale, la musique comme partout est un peu envahissante et le chef ne donne que peu d’interviews selon le vieux principe que « ma cuisine » parle pour lui. Dans le même esprit, interdiction absolue de prendre des photos pendant le repas pour se concentrer uniquement et exclusivement sur la cuisine. Magnus Nilsson impose donc des règles de purification avant de se retrouver en tête-à-tête avec ses plats. Concentration sur le goût et non sur l’environnement et l’ambiance. Ce grand homme par la taille et le talent vient d’être classé 34ème dans le classement des 50 meilleurs restaurants du magazine anglais « Restaurant » qui fait rigoler tout le monde en France. En Suède, c’est considéré comme une belle récompense. Peut-être que cela aussi lui est égal…En tout cas, un repas chez lui est une sorte de rituel presque mystique et l’on a quand même la désagréable impression que l’on n’est pas là pour rigoler. Et pourtant…
Comme souvent, il fait partie de ces chefs qui prennent des poses et peuvent être insupportables mais devant les plats tout s’efface pour laisser la place à l’homme et à son talent. Quatre amuses bouche : cheveux de lin et chips au vinaigre (bof) ; petit morceau de fromage de chèvre frais dans du petit lait chaud parfumé à la lavande (re bof !) ; œufs de truite sauvage servi dans une croûte de sang séché de porc : fantastique ! lichens frits avec une crème à l’ail (lichen sans goût, mais belle crème tout en douceur).
La ronde des plats peut commencer…
Coquilles Saint-Jacques cuites sur des branches de genièvre : les grosses Saint-Jacques de Norvège péchées à la main, servies ici nature avec un jus très iodé et à l’eau de mer dans un retour aux éléments primitifs. Impressionnant. Malheureusement servi avec un Chablis 2010 un peu trop « nature » donc trop acide et pas assez frais. Un Cabillaud légèrement imprégné de miel et cuit au four enveloppé dans une grande feuille de chou vert, et parfumé au vinaigre d’épicéa : magnifique avec ce vinaigre extraordinaire qui vient fouetter la légère fadeur du poisson. Moule nature sur une tartelette aux pois sauvages : grand, goûteux et original. La Moelle sur des toasts aux herbes accompagnés de fleurs est purement magique en présentation et en goût, subtil et puissant. Ce plat, dans la construction du repas, fait passer subtilement des saveurs iodées et de poissons vers les goûts de viande. Ainsi, l’Aloyau issu d’une vache laitière « à la retraite » et affiné sept mois est absolument magnifique, un gras extraordinaire, une cuisson parfaite et juste une petite fondue d’oignons pour ne pas « gêner » la viande. Sans aucun doute, le plus beau plat. Festival de desserts grandioses dont un Ice cream au petit lait, confiture de framboises et œufs de canette battu, vraiment remarquable dans la vérité du goût et la subtilité des alliances.Un grand homme qui fait un travail incroyable sur les goûts, les saveurs, les couleurs, les textures et qui se différencie de « l’école » danoise avec plus de variétés, une plus grande rusticité que la sophistication des préparations n’altère en rien, et donc des plats plus savoureux. Un pur chef d’œuvre.
Carte des vins variée et forcément internationale avec de bons choix surtout en Italie et en Allemagne.
Service concentré sinon pénétré par l’importance de l’enjeu.
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