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Billet de Milan, par Clémence Tombereau…

Publié le 10 novembre 2012 par Chatquilouche @chatquilouche

La vie quitte la villeBillet de Milan, par Clémence Tombereau…

Les immeubles.  Des spectres sombres qui hantent les avenues vides, des silhouettes fatiguées bien ancrées dans le sol d’asphalte.  Ils paraissent presque humains, tant ils sont les vestiges d’une époque où la main de l’homme actionnait de dociles machines.  Aujourd’hui les machines s’actionnent les unes les autres, s’unissent dans des étreintes constructrices.  Les sentiments sont déchus.

La main de l’homme est momifiée, pétrifiée.  La main de l’homme n’est qu’un souvenir.  Un souvenir vivace, agile, ailé, qui désormais s’ankylose sous une enveloppe de chair.  Les doigts ne bougent plus.  Ils se souviennent, peut-être, dans leur petite mémoire tactile, qu’un jour ils ont été.  Un jour ils ont bougé, touché, vécu.  Les doigts pleurent.

Les immeubles, de l’extérieur, sont à l’abandon.  De l’extérieur on pourrait croire qu’il n’y vit plus personne.  Ce serait vrai.  Car, derrière les façades épaisses, poussiéreuses, fissurées, épuisées, ce n’est pas vraiment de la vie qui s’agite.  Juste un grésillement.  Presque un silence.  Et des êtres.  Des êtres qui ne sont plus.

On ne sait pas si les immeubles s’écrouleront un jour, sous le poids de leur propre asthénie, lassés de ne plus être chatouillés par l’agitation humaine.  Ils auront leur revanche.  Ils s’écrouleront.  On espère.

Le grésillement.  Le silence.  Toujours.  Insupportable.  Plus personne pour ne plus supporter.  Tout le monde supporte tous ces êtres déjà morts.

Notice biographique

Billet de Milan, par Clémence Tombereau…
Clémence Tombereau est née  à Nîmes en 1978. Après des études de lettres classiques, elle a enseigné le français en lycée pendant cinq ans.  Elle vit actuellement à Milan, en Italie.  Finaliste du prix Hemingway en 2005, lauréate du concours littéraire organisé par le blogue Vivre à Porto, elle a contribué à la revue littéraire Rouge-déclic (numéro2) et elle nourrit régulièrement un blogue que vous que vous auriez intérêt à visiter : http://clemencedumper.blogspot.com/  (Clémence Tombereau vient de publier aux Éditions du Chat Qui Louche Fragments, un recueil de billets que vous pouvez vous procurer en version numérique pour un prix plus que modique à l’adresse suivante : http://www.editionslechatquilouche.com/)

(Une invitation à visiter le jumeau du Chat Qui Louche : https://maykan2.wordpress.com/)


Filed under: Clémence Tagged: Clémence, décor, Milan, urbanité, vide, ville

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