En 1686, sur le trône depuis plus de 25 ans (pas besoin de faire de jeu de mot ici, la suite s’en chargera), le bon Roi Soleil a du pain sur la planche. L’année précédente, il révoque l’Edit de Nantes promulgué par son grand-père de roi, Henri IV. La conséquence de cet acte s’exprime par une chasse aux protestants et de fait, un exode massif de ceux-ci. Situation tendue donc, mais Louis n’y prête guère attention, il est préoccupé par son fondement. Bref, il a mal au cul.
Oui, Louis XIV traine une méchante fistule anale qui l’incommode au plus haut point. Les médecins ont beau le tartiner de pommades et d’onguents divers, le roi (très douillet) continue de couiner du matin au soir. En dernier recours, on se tourne alors vers le chirurgien-barbier (ça met bien en confiance) Charles-François Félix qui depuis pas mal d’années déjà, teste différentes opérations sur les patients des hospices de la capitale. C’est ainsi que le 18 novembre 1686, le roi passe sur le billard, dans sa chambre. Pendant que le coiffeur-charcutier s’occupe de la rondelle royale, Madame de Maintenon (son épouse secrète) et le sieur de Louvois (son ministre de la guerre) sont présents et profitent du spectacle.
Contre toute attente, l’opération se déroule plutôt bien. Mais la convalescence du roi est longue. Il faudra même que Charles-François, le boucher-capillaire, intervienne à deux reprises sur l’anneau du monarque. Enfin, en janvier 1687, le roi cesse de souffrir le martyr. On n’oublie d’ailleurs pas d’informer la cour et le peuple parisien du rétablissement du roi.
Se sentant plus à l’aise du popotin, Louis décide de prendre l’air. On le mène à la Maison Royale de Saint-Louis, près de Versailles. Là, il rencontre la religieuse en chef de l’établissement, Madame de Brinon, qui lui remet un motet qu’elle a écrit pour soutenir le roi dans sa difficile et douloureuse épreuve. Motet que Lully mettra rapidement en musique et qui dit ceci :
- Grand Dieu, sauvez le Roi !
- Grand Dieu, vengez le Roi !
- Vive le Roi !
- Qu’à jamais glorieux,
- Louis victorieux
- Voye ses ennemis
- Toujours soumis
- Grand Dieu, sauvez le Roi !
- Grand Dieu, vengez le Roi !
- Vive le Roi !
Un an avant la mort de Louis XIV qui règne depuis 71 ans (en 1714 donc), la fistule du gars Louis est un mauvais souvenir. Cette année là, le compositeur allemand Georg Friedrich Haendel visite Paris. Alors qu’il passe fortuitement à la Maison Royale de Saint-Louis, le motet censé soulager le souverain 30 ans plus tôt l’interpelle. Aussi, sur sa demande, on lui accorde le droit de recopier les paroles et l’air (la partition de Lully) de la chanson. De retour en Angleterre (il habite à Londres où il a plus de succès que dans son propre pays), il s’emploie à traduire le motet en anglais, conserve la mélodie composée par Lully et offre l’oeuvre au roi Georges Ier en la présentant comme sienne (l’oeuvre). Oeuvre qui dans la langue de Keith Richards (quand il est à jeun) donne ceci :
- God save our gracious King,
- Long live our noble King,
- God save the King !
- Send him victorious,
- Happy and glorious,
- Long to reign over us
- God save the King
Bien évidemment, quand une femme est sur le trône, on chante « God save the Queen ». Donc, vous ne rêvez pas, l’hymne des brittons a bien été bâti autour du trou de balle de Louis XIV. Ca vous en bouche un coin, hein ?
Du coup, je me demande : 10 000 supporters de foot anglais qui chante à tue-tête God save the Queen dans les stades avant chaque match, n’est-ce pas là une mise en abyme ? (comprendra qui pourra
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