J'ai pourtant un planning avec chaque thème bien noté... Mais la grenouille s'est transformée en lapin d'Alice. Alors, je pioche un peu au hasard, pour tenter de rattraper mon retard.
雫, shizuku, gouttes d'eau, gouttelettes, est un mot que j'adore.
Pour moi, il sonne comme l'essence même de la contemplation.
Une goutte circonscrit l'infini.
Un cercle, sans fin ni début, une sphère parfaite.
Et dedans, un monde éphémère et sans fin s'y reflète, grandit.
Quand je photographie des gouttes d'eau, le monde change.
Les bruits s'étouffent.
Il ne reste que le chant des étoiles, la mélodie des arbres et des herbes, la parole de la lumière qui joue à cache-cache dans un univers de poche.
J'entre dans un ailleurs vide d'humain plein de magie.
Un ailleurs d'équilibre entre le minéral et le végétal ou l'organique qui tient prisonnier cette goutte, lui donne un sens, une individualité. Il suffit d'un sursaut de la brise, l'univers bascule.
La goutte vacille, tombe ou glisse et rejoint les autres milliards de gouttes. Ces gouttes d'eau qui sont là, depuis des milliards d'années.
Parce que l'eau ne vieillit pas.
Elle est là, depuis la formation de notre planète
Éternelle.
Quand je la contemple ainsi, réduite, petite, je mesure l'impossible de l'infini, dans l'espace et le temps.
Je mesure le minuscule de cette sphère, de mon existence. Je mesure aussi le lien, entre cette goutte et toutes ses sœurs.
Toute cette eau.
Toujours la même, salie, purifié, depuis des milliards d'années.
Et, par capillarité, cette goutte me purifie aussi.
Me vide.
Me nettoie.
Me transmet une énergie trop ancienne et trop précieuse pour que je puisse vraiment l'appréhender.
Voilà pourquoi, quand je croise une goutte, je m’arrête. En ville, en campagne, en forêt. Seule ou avec d'autres.
Je m'arrête.
L'envie et le besoin trop grand, impérieux.
Il faut que je photographie...
Contempler pour ne jamais dévisser de la vie
Seul le cercle est parfait, et la vie est parfaite ainsi !
Copyright : Marianne Ciaudo