… et des fantasmes masculins bien classiques!
J’avoue, je me confesse, je me repens. Lorsque Minou a lancé le challenge Badinage et libertinage, mon esprit grivois s’est remémoré les heures passées à dévorer les histoires sulfureuses du Divin Marquis. Raffolant des lectures scandaleuses, je me suis précipitée dans ce challenge avec l’intention d’étendre mon champ de connaissance - purement littéraires, les connaissances! Tss-tsss…
Si, comme moi, vous n’envisagiez le courant libertin que sous l’angle du sadisme et de la dissolution des mœurs, je ne saurais que trop vous recommander de nous rejoindre.
Le libertinage est en effet un courant aux multiples facettes. Certains écrits ne prétendent même pas rivaliser avec le Mummy Porn qui envahit nos chastes chaumières. Ainsi en est-il de Fanny Hill, la fille de joie, roman initialement écrit par John Cleland et très librement traduit de l’anglais par Fougeret de Montbron, puisque modifié, raccourci et… réduit à sa quintessence – le sexe.
Loin des mutilations, des profanations, du sang et des excréments chers au Marquis de Sade, Fanny Hill incarne des fantasmes masculins très - trop -sages – et par là-même, presque décevants:
- le mythe du sauveur: pauvre Fanny! Orpheline à 16 ans, la voilà seule au monde. Elle n’a de cesse de tomber entre les griffes de mères maquerelles qui cherchent à abuser de sa faiblesse pour en tirer profit – soit dit en passant, inquiétante analyse de la psychologie et de la solidarité féminine.
Heureusement pour la jeune fille, des gentilshommes pleins de compassion se relayeront pour lui assurer une vie digne et confortable. Merci messieurs, car selon John Cleland, la gent féminine ne ferait pas long feu livrée à elle-même.
Rassurez-moi, les hommes ne croient pas vraiment qu’une femme tombe amoureuse parce qu’on lui offre gîte et couvert… si?
. - le culte de la virginité: le sexe, dans Fanny Hill, se résume à un dépucelage continu. Et puisque qu’on ne se fait déflorer qu’une fois, l’imagination de l’auteur a fait le reste et Fanny Hill semble retrouver sa virginité avec chacun de ses amants. Chaque nouvelle conquête étant bien mieux dotée que la précédente, la jeune héroïne revit plusieurs fois la scène initiatique qui fit d’elle une femme. Et ces hommes plein de fatuité de jouir de l’illusion d’être le premier - chacun son tour.
Pas de quoi grimper aux rideaux pour le lectorat féminin… Il y a fort à parier que les amateurs de littérature érotique trouveront ce roman un peu fade. Mais quelle écriture! On retrouve le style des classiques: des phrases élégantes, un vocabulaire choisi avec soin, un style imagé, des tournures châtiée.
JE VOUS LE CONSEILLE SI…
… vous souhaitez vous initier aux joies du libertinage – en tant que courant littéraire, s’entend. Fanny Hill, la fille de joie, se lit rapidement (86 pages) et risque moins de décourager les lecteurs peu avertis que les écrits de Sade.
EXTRAIT INTERDIT AUX MOINS DE 18 ANS :
Fanny pense-t-elle vraiment couper court aux assauts avec ces paroles que Charles prend pour des encouragements?
[...] quelle fut sa surprise quand après maintes vigoureuses attaques qui me causèrent une douleur des plus aigües, il vit qu’il ne faisait pas le moindre progrès.
- Ah! lui disais-je tendrement, je ne le puis souffrir… non, en vérité je ne le puis… il me blesse… il me tue.
Charles ne crut pas autre chose, sinon qu’il l’avait trop gros, et moi trop petit: car il ne pouvait pas se persuader que je fusse encore pucelle.
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