La fin de la sidérurgie ?

Doc.1: Production de l'acier par catégorie de pays (source: EQuinOX, 2012)

Quand, à propos de l'affaire ArcelorMittal, j'entends les rodomontades de notre ministre du Redressement productif que l'on présente souvent comme une sorte de trublion alors qu'il doit nécessairement agir avec l'aval de l'Elysée, je pense souvent à cette citation du poète anglais Wystan H. Auden: "Assemlbling with ceremonial pomp, the imperial Diet gravely debated legislation it had no power to reject." (Rassemblée en grande pompe, la Diète impériale discuta gravement d'une législation qu'elle n'avait pas le pouvoir de rejeter). On discute gravement, avec les mouvements de menton habituels dès lors qu'une caméra pointe son nez, pour constater son impuissance quelques jours plus tard et retourner sa veste le plus discrètement possible. On l'a vu s'agissant de PSA, mais c'est une posture qui n'était pas absente du gouvernement précédent.

Doc.2: La production sidérurgique par pays en millier de tonnes (source: EQuinOX, 2012)

Je crois que pour y voir plus clair dans ce dossier, il faudrait avoir toujours à l'esprit les grandes tendances de fond. Je  signale au passage que pour réaliser ces trois graphiques,  j'ai utilisé les chiffres de la dernière livraison du précieux "Images économiques du Monde 2013" (Armand Colin), dirigé par une armée de géographes. Premièrement, la production d'acier à l'échelle de la planète se porte bien, mais elle est largement dominée par les pays du Sud (doc.1). On le voit très bien dans le graphique, la production dans ces pays durant la première décennie du XXe siècle,  augmente de 186% alors que notre "croissance" est négative (-5,7%) pour employer un oxymore.... (5,7%).  On peut préciser les choses quand on se place à l'échelle des pays émergents: cela n'étonnera personne mais c'est encore une fois la Chine qui réalise une belle percée avec 45% de la production mondial d'acier.  A cet égard, le document 2 est impressionnant, on a le sentiment de voir une immense tour à l'architecture très moderne, qui se dresse et domine de très loin l'ensemble du paysage de la production sidérurgique de la planète. Ensuite viennent d'autres pays asiatiques: l'Inde, la Corée du Sud, etc.

Doc.3: Evolution de la production sidérurgique de 2000 à 2011 en % (source: EQuinOX, 2012)

Qu'en est-il des pays développés ? Ils ont le drapeau en berne... En surcapcités, ils surnagent, et se situent en queue de peloton. Les Anglais ont beau jeu d'ironiser sur la France, en alimentant une anglophobie toujours lancinante, ils ont littéralement disparu de mes graphiques (ils représentent 0,6% du marché, et leur production a chuté de 36% en dix ans...). Même  les  Allemands qui eux non plus, ne comprennent pas cette posture jugée irresponsable de notre ministre, revoient apparemment leur stratégie industriel: à preuve le choix de ThyssenKrupp qui envisage d'abandonner le secteur. Peut-on dans ces conditions parler de la "fin de la sidérurgie" ? Assurément non si l'on prend conscience que la planète n'a jamais produit autant d'acier que l'année dernière, mais que cette production est très largement dans les mains des pays asiatiques aujourd'hui. A l'heure où l'on parle en France ou ailleurs de réindustrialisation, il faudrait prendre la mesure de cette avance vertigineuse des pays du Sud, pour éviter tout simplement, de se payer de mots...

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