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Chronique âpre et intimiste sur les enfants soldats en Afrique

Par Borokoff

A propos de Rebelle de Kim Nguyen ★★★☆☆

Rachel Mwanza - Rebelle de Kim Nguyen - Borokoff / Blog de critique cinéma

Rachel Mwanza

En Afrique Subsaharienne, Komona, une jeune fille de 12 ans, est enlevée dans son village par une milice rebelle en guerre contre le gouvernement. Avant de l’enrôler dans ses rangs, le commandant de la milice oblige la jeune fille à tuer ses parents à la Kalachnikov…

Une chronique en forme de fable âpre mais optimiste sur les enfants de la guerre en Afrique. C’est ainsi que l’on pourrait qualifier le quatrième long-métrage du Canadien Kim Nguyen, qui a commencé à rédiger le scénario de Rebelle il y dix ans. On sent d’ailleurs sa grande connaissance de l’Afrique Centrale, de ses mœurs et de sa culture.

Rebelle n’a rien à voir avec le dessin-animé sorti l’été dernier et Komona n’est pas une enfant écossaise à la longue chevelure rousse mais une adolescente africaine de 12 ans dont le passage à l’âge adulte est scellé par une tragédie sanglante, un traumatisme à jamais ancré en elle. Tourné chronologiquement dans des décors naturels de la République démocratique du Congo et de Kinshasa, Rebelle décrit le parcours et l’endoctrinement d’une fillette entre sa douzième et sa quinzième année. Tout en devenant peu à peu une meurtrière et une véritable machine de guerre, Komona n’en a pas moins gardé au fond d’elle-même une profonde humanité et une âme d’enfant. C’est cette âme d’enfant que le film cherche à saisir et à faire ressortir. Le désir d’indépendance et la liberté d’esprit de Komona résultent de son éducation et d’une grande force de caractère. Dotée d’un pouvoir visionnaire qui la rapproche d’une magicienne, l’adolescente obtient rapidement une place privilégiée auprès du grand chef de la milice rebelle.

Rachel Mwanza, Serge Kanyinda - Rebelle de Kim Nguyen - Borokoff / Blog de critique cinéma

Rachel Mwanza et Serge Kanyinda à droite

La jeune fille a en effet des visions prémonitoires. Elle peut sentir à l’avance les soldats du gouvernement arriver mais elle voit aussi les fantômes de ses parents morts comme de toutes les victimes du conflit. Les visions de ces fantômes peints en blanc se ressentent particulièrement dans ses rêves la nuit ou en plein jour, sous l’effet d’une drogue puissante et hallucinogène que les rebelles puisent dans l’écorce d’un arbre spécifique.

Dans Rebelle, les images sont tantôt crues et violentes, tantôt teintées d’une poésie et d’un pouvoir d’enchantement, de suggestion dignes d’un Terrence Malick, lors de ces scènes notamment en forêt où la lumière perce à travers les immenses feuilles des hauts arbres. La caméra est toujours au cœur de l’action et des combats, Kim Nguyen privilégiant les gros plans sur les corps et les visages dont celui de sa merveilleuse actrice principale, Rachel Mwanza, repérée par hasard dans les rues de Kinshahsa et récompensée pour sa performance par un Ours d’Argent lors du dernier Festival de Berlin. Si sa caméra à l’épaule confère au film une dimension réaliste proche du documentaire, la voix-off de Komona parlant à son futur bébé nuance ce propos. Komona est une jeune fille qui a grandi avec des idées religieuses. Courageuse, acharnée, elle croit profondément en Dieu mais est restée une enfant avec sa part de rêves et de naïveté. Une enfant qui pense qu’il faut conjurer le mauvais sort en racontant tout de son histoire, sans rien occulter, à son bébé qui va naître.

L’originalité de cette voix-off donne au film une dimension intimiste, une beauté aussi insoupçonnable que l’histoire d’amour entre Komona et un jeune rebelle albinos de 15 ans surnommé le magicien et considéré lui aussi comme un être doué de pouvoirs surnaturels. Les deux adolescents s’aiment malgré l’horreur et le conditionnement dans lesquels ils ont été placés. La boucherie qu’on les oblige à commettre chaque jour. Ils s’aiment et rêvent d’échapper à leur condition d’esclaves, dans une guerre où ils n’ont rien à voir, encore moins à y faire. Un beau matin, ces deux-là parviendront à s’enfuir.

Sans fard, Rebelle décrit cet amour adolescent naissant au cœur de la barbarie et des combats. C’est un message d’espoir, une chronique optimiste qui n’empêche pas Kim Nguyen d’être lucide. Car si le jeune réalisateur né en 1974 sait que la tragédie des enfants soldats en Afrique n’est pas prête de s’arrêter et qu’il est très difficile de les extirper de cette guerre dans laquelle ils ont été pris en otages depuis leur plus jeune âge, il sait aussi que rien ne l’empêcher, ni lui ni son personnage principal, de croire en des lendemains meilleurs. Quel régime barbare pourrait interdire de rêver ?…

http://www.youtube.com/watch?v=Tmu-fYUDDyM

Film canadien de Kim Nguyen avec Rachel Mwanza, Serge Kanyinda, Alain Lino Mic Eli Bastien (01 h 30)

Scénario de Kim Nguyen 

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Mise en scène 

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Acteurs : 

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Dialogues : 

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Compositions Soul of Angola: Anthologie de la Musique Angolaise 1965 – 1975

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