Magazine Concerts & Festivals

O2zen est mort, longue vie à Odezenne

Publié le 19 décembre 2012 par Pucklife @puck_magazine
O2zen est mort, longue vie à Odezenne

O2zen est mort, longue vie à Odezenne

Par Victoria le 19 décembre 2012

Coincé dans les ruelles bruxelloises d’un quartier où on s’emmerde ferme, l’Atelier 210 n’a jamais été un incontournable des nuits Hip Hop de la capitale belge. La surprise n’en était que plus grande d’y croiser tout à la fois Veence Hanao, crépusculaire, Mochélan, toujours aussi entraînant qu’intelligent, et les excellents frenchy Odezenne … qu’on m’a en plus autorisé à aller chatouiller en loges micro à la main. Rencontre avec ces quatre bordelais d’adoption.

Puck: Odezenne, Veence Hanao et Mochelan : ce soir à l’Atelier 210 c’est un peu la soirée Rap des gens qui n’écoutent pas de Rap. Au gré des sorties on vous accorde justement une étiquette 100% Hip Hop puis pas du tout … est-ce que ça ne vous ennuie pas ce jeu des tiroirs où le public et la presse cherchent à vous ranger ?

Alix (MC): A nos yeux c’est plutôt bon signe d’être difficile à catégoriser. Mais pour Odezenne ce serait plutôt le problème inverse puisqu’on nous a mis d’office dans la case Hip Hop. Dans pas mal de magazines on a eu droit à « la relève », « la renaissance », ce genre de conneries … et c’est plutôt nous qui refusons ça parce qu’on prétend faire autre chose. Comme toutes les étiquettes c’est chiant.

Puck: La France a-t-elle un problème avec le rap français ? Elle a Le Sept, Grems, Soklak, Fuzati, Oxmo Puccino, Rocé, Vicelow, La Fronce … et s’entête à ne parler que d’Orelsan et du nouveau Booba.

Alix: Il y a un cap média qui est un peu compliqué à passer parce qu’effectivement les couvertures sont réservées à d’autres gens. Mais pour tous les noms que tu as cité, tout comme pour nous, avec ou sans couverture, on fait notre musique, on fait des tournées et on en vit plutôt.

Puck: Pour terminer avec les ponts ou les comparaisons sur l’échiquier Rap hexagonal, vous m’avez parfois fait penser à un autre bordelais : Grems, autant dans certains textes que dans votre approche du jeu artistique. Est-ce quelqu’un que vous connaissez ? Que vous appréciez ? Peut-être même quelqu’un qui vous a influencé ?

Alix: On ne peut pas dire que Grems nous ait inspiré, tout simplement parce qu’on n’a jamais beaucoup écouté ce qu’il faisait jusqu’à récemment même si on surveillait de loin. Et puis je trouve qu’on n’a pas du tout la même manière de rapper. Il est super rapide et très technique, c’est un gros performer. A part sur les morceaux « Saxophone » et « Tu Pu Du Cu » où on partage un peu sa façon de jouer avec les mots … mais bon on a fait quarante titres et sur les quarante on en trouve deux qui font penser à ce genre d’exercice de style mais il y en a trente-huit qui n’ont rien à voir. Tu comprends donc qu’on ne puisse pas te dire que Grems nous a influencé, d’autant qu’on ne le connaissait pas trop. Par contre on l’a rencontré il y a un mois à Nîmes sur un plateau en commun et on s’est hyper bien entendu.  Je suis vraiment admiratif de sa productivité, de sa façon de faire, de simplicité et de son éthique.

Puck: Sans vouloir insister, Grems est connu pour baigner à la fois dans la musique et le graphisme (il est graffeur, illustrateur et graphiste -ndlr), c’est là encore un trait commun puisque vous entretenez des collaborations assez fidèles avec des artistes venus d’autres disciplines : Romain Winkler pour les vidéo clips, Edouard Nardon pour vos visuels . Est-ce important de constituer ce genre de famille aux compétences variées ?

Alix: C’est une question qu’on nous pose souvent alors qu’on est étonné que ce ne soit pas ça la règle. Quand on défend une musique on est amené à passer par des supports promo mais nous n’avons pas d’équipe marketing ou de gens chargés de la communication qui travaillent pour nous. Par contre, on est entourés de plein de gens très créatifs avec qui de temps en temps on va imaginer d’investir tel ou tel support. L’image, le texte, les clips, le CD, la pochette, tout devient un espace de création.

Puck: Depuis la sortie de l’album OVNI vous rencontrez un certain succès pourtant on en sait toujours assez peu sur votre biographie : pourriez vous me raconter les débuts d’Odezenne ?

Mathia: En gros, j’étais à la fac, je devais avoir vingt ans, Alix rentrait d’Angleterre et m’a dit « ce serait bien qu’on fasse du rap ». On s’était connu à quinze ans et à l’époque je faisais du Rock, beaucoup d’électro et je n’avais jamais écouté un seul disque de rap. Donc il m’a fallu m’adapter, leur moyen d’expression passe par cette musique là et j’ai donc essayé d’en comprendre les codes mais on a toujours pensé que ces barrières étaient là pour être élargies voire cassées, d’autant plus que ce n’était pas ma vision musicale et au final eux ne se limitent pas à ça non plus. On a donc commencé à faire des morceaux, puis Lodjeez a très vite rejoint l’écurie.

Puck: Justement, la formation live qui casse l’éternel binôme Hip Hop sur scène à savoir un DJ et un ou des MC’s, est-ce volontaire de votre part ou les choses se sont-elles juste imposées comme ça ?

Jaco: On n’a pas le choix !

Mathia: Je suis musicien avant d’être producteur. En fait je ne me considère même pas comme producteur. Il y a la musique et les textes dans notre groupe et tout ça doit être joué, plus comme un groupe de rock que comme du rap. Tu parlais tout à l’heure de se positionner par rapport à l’étiquette rap mais je me pose souvent la question suivante : si les rappeurs mettaient de la mélodie dans leur couplets, juste une pointe de mélodie, un truc à la Gainsbourg qui rappait presque, alors qu’est-ce que ce serait comme musique ? Comment l’appellerait-on ? Ce n’est pas parce que quelqu’un chante que le morceau devient une chanson. Et quand bien même, je n’ai jamais vu de bac chanson dans un magasin de disques.

Puck: Est-ce que c’est parce que vous êtes encore dans cette phase instinctive et expérimentale que vous proposez si peu voire pas du tout de collaborations, de featuring qui est un jeu auquel on se prête assez facilement dans le milieu Hip Hop ? Ou ce type de proposition ne vous intéresse-t-il juste pas ?

Jaco: Il y a une troisième possibilité que tu oublies, c’est que personne ne nous appelle pour une collaboration, sauf certains gars avec qui on fait de l’image.

Puck: Si je suis votre logique, il faudrait alors plus s’attendre à un featuring instrumental, voire un remix …

Alix: Pour ça il faudrait que Mathia laisse sa place et ça, c’est pas gagné!

Puck: Rayon potins : vous avez démarré sous le pseudo O2zen avant de devenir Odezenne en toutes lettres … pourquoi ?

Alix: Odezenne, c’était le nom d’une dame. Elle s’appelait madame Odezenne, comme on l’écrit actuellement. Entre temps on a eu ce petit écart de mauvais goût, ce jeu de mot merdique comme font tous les coiffeurs ou les esthéticiennes tu vois : « Épile et face », O2zen, même combat.

Mathia: On s’est repris juste à temps avant la sortie de l’album, après ça aurait été trop tard.

Interview réalisée par le Révérend D. pour Puck Magazine et Tales From The Crate (Radio Show)

Odezenne a sorti son dernier album O.V.N.I sur Universeul


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Pucklife 710 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte