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Peindre et faire l’amour (ratage complet)

Par Borokoff

A propos de 4h44 d’Abel Ferrara ★☆☆☆☆

Willem Dafoe - 4h44 d'Abel Ferrara - Borokoff / Blog de critique cinéma

Willem Dafoe

A New-York, Cisco (Willem Dafoe), un acteur et sa copine peintre Skye (Shanyn Leigh) vivent ensemble dans un splendide studio leurs dernières heures. La fin du monde a en effet été programmée pour le lendemain, à 4h44 du matin et il n’y a plus aucun doute que le monde s’arrêtera à cette heure très précise…

Difficile de retenir quelque chose de bon ou même de positif dans ce film pompeux et froid qu’est 4h44, à la fois moraliste et qui mutiplie les clichés en tout genre.

Même un acteur de la trempe de Willem Dafoe ne parvient pas à sauver la situation ni à s’extraire de l’artificiel dans lequel le film baigne tout du long. Rien à voir donc avec Go Go Tales, le dernier film de Ferrara. Cisco et Skye (une peintre beaucoup plus jeune que lui) attendent la fin du monde (prévue aujourd’hui même selon le caldnrier Maya), cloîtrés dans leur magnifique appartement sur les toits new-yorkais. Ils s’enlacent, font l’amour, s’étreignent à nouveau avant de téléphoner sur Skype à leurs proches pour leur dire Adieu. Une immense télévision plantée au milieu de la pièce égrène en continu tantôt des images du documentaire d’Al Gore, Une vérité qui dérange (2006) tantôt des discours du Dalaï-lama ou d’adeptes du bouddhisme auquel Ferrara s’est lui-même converti. Mais tout cela sonne étrangement faux et vide, désincarné jusqu’à provoquer de l’agacement devant les poses de ce couple qui peint, fait l’amour (les références à Scorsese et à son Who’s that knocking at my door ? ne sont jamais très loin), embrasse les photos de leurs proches ou gribouille des pensées sur un cahier (Cisco).

4h44 d'Abel Ferrara - Borokoff / Blog de critique cinéma

C’est un peu vide et superficiel mais surtout, Ferrara mélange un peu tout et part un peu trop loin (défaut qu’il a toujours eu même dans Bad Lieutenant), des images en surimpression de troupeaux d’animaux courant dans des plaines aux processions de fervents musulmans, juifs ou catholiques en passant par les discours alarmistes des spécialistes contre la sur-pollution et l’asphyxie de la Terre. Cisco lui-même s’emporte de manière un peu grotesque à la fois contre ces pseudos spécialistes de l’environnement qui n’avaient rien prévu du tout selon lui comme sur son propriétaire qu’il voit passer dans la cour et sur lequel il aboie parce qu’il est bien minable d’avoir augmenté son loyer le mois dernier !

Tout part donc dans tous les sens dans ce film sans queue ni tête qui ne parvient pas surtout à susciter un grand intérêt de la part du spectateur. En double de Ferrara, Cisco est un ancien drogué converti au bouddhisme par Skye (Shanyn Leigh est la femme du réalisateur dans la vie et elle a également converti Ferrara à cette religion) et qui cherche à tout prix à résister et à ne pas replonger dans la drogue, même à quelques heures de sa propre mort.

4h44 d'Abel Ferrara - Borokoff / Blog de critique cinéma

Dans de nombreuses scènes, les protagonistes utilisent Skype pour se dire Adieu. Dans une interview, Ferrera a confié qu’il voulait montrer le côté désincarné des relations humaines qui s’opposent à la passion physique et amoureuse, à la relation charnelle entre Cisco et Skye. Mais ce que l’on voit, ce sont surtout des scènes d’Adieu qui sonnent faux et n’émeuvent pas.

Par exemple, lorsque Skye confie à sa mère sur Skype qu’elle a surpris Cisco (lui-même sur Skype peu avant elle) dire à son ex-femme qu’il l’aimait davantage que sa nouvelle compagne, elle se met à pleurer. Mais cette scène n’émeut étrangement pas. Elle fait suite surtout à une scène carrément grotesque d’engueulade hystérique sur Skype entre Cisco et Skye d’un côté, et l’ex-femme de Cisco à l’autre bout de l’ordinateur ! Auparavant, Cisco s’était lui-même mis à pleurer face à sa fille sur Skype, ce qui avait déclenché des rires dans la salle…

On l’aura compris, Ferrara s’est complètement raté comme Von Trier dans Melacholia, passant à côté de son sujet, à côté de l’émotion qu’il voudrait susciter mais qu’il fait surjouer à ses acteurs dans un décor et des répliques stéréotypés, agaçantes comme les sur-commentaires pseudo-métaphysiques de Cisco sur les images télé qu’il regarde ou lorsque Skye enlace un livreur de bouffe vietnamienne en lui disant qu’elle l’aime ! Le ridicule ne tue pas au moins, même à quelques heures de la fin du monde…

Les seuls moments où l’on sent que Ferra parvient à s’échapper de ce huis clos de l’appartement et des carcans dans lesquels il s’est enfermé tout seul, c’est lorsque son personnage de Cisco sort dans la rue après son engueulade avec Skye pour rendre visite à son frère. Là, on sent enfin la vie et de la liberté affluer dans son film, quelque chose non plus de complaisant et d’artificiel mais de poignant au contraire comme la relation qui unit les deux frères.

Cela arrive un peu tard. Mais c’est surtout un peu court pour un film d’1 heure 22…

http://www.youtube.com/watch?v=bPu9CaPXfvk

Film américain d’Abel Ferrara avec Willem Dafoe et Shanyn Leigh (01 h 22)

Scénario d’Abel Ferrara :

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Mise en scène :

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Acteurs :

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Dialogues :

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Compositions de Francis Kuipers :

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