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Le Cantique de l'apocalypse joyeuse

Publié le 16 décembre 2012 par Montagnessavoie
Arto Paasilinna, Le Cantique de l'apocalypse joyeuse, 1992. Premier livre que je lis de ce jeune homme apparemment très connu. Encore une preuve de ma vaste inculture. Au passage, quel plaisir de parcourir les chemins qui mènent d'un livre à l'autre, d'une bouche à mon oreille et de quelques bons hasards. J'aime assez l'humour des écrivains du nord de l'Europe (Norvège, ici, Finlande), je plonge donc dans ce roman sans réelle appréhension. Au départ, je ne comprends pas où l'auteur veut en venir : son héros est le petit fils d'un brûleur d'église athée et communiste (ce qui revient au même et vice versa). Sur son lit de mort, le grand-père confie donc à Eemeli le soin de bâtir une église. Le personnage pense que son aïeul perd la boule. Qu'importe, il doit respecter le testament. Nous assistons donc pas à pas, pièce par pièce, détail par détail à la construction de l'église en bois sur un territoire vierge de toute population, pris dans la neige l'hiver, bordé par un étang l'été, une sorte de petit paradis sur terre. Seulement, au bout de nombreuses dizaines de pages, les centimètres carrés, le nombre des angles et les moyens de transport du bois commencent à nous lasser. Enfin, on comprend quand même avec quel sérieux et quelle méticulosité le personnage mène ce projet à bien. Le goût du travail bien fait. On se croirait dans une pub pour le jambon sous cellophane. Bref. A mon avis, l'histoire commence vraiment quand le protagoniste part chercher un orgue d'occasion pour l'église et se retrouve emprisonné quelques années pour une sombre affaire d'homicide involontaire et de clinique qui trafique des organes. Passons. A ce moment, on assiste à une accélération temporelle du récit. Les années passent, le monde change. Et c'est là que ça devient intéressant, puisque l'auteur, qui écrit au tout début des années 90, nous prévoit des catastrophes en chaîne, dont il faut bien admettre que certaines se sont réellement produites. Seule la petite communauté qui s'est bâtie autour de l'édifice religieux et qui se compose d'écolos cultivateurs de plantes aromatiques et autres paysans allergiques à la modernité, seule cette communauté donc reste intacte. Accident nucléaire, villes envahies par les déchets, migrations géantes de populations à cause de la famine, troisième guerre mondiale, tout y est. A la lecture de cet essai entre le conte philosophique et l'anticipation, on a quand même du mal à se réjouir de la leçon donnée par cette poignée d'irreductible dont le retour à la terre et l'esprit de décroissance leur permettent de survivre et de se soustraire aux catastrophes, et on reste plutôt sur une étrange inquiétude, une sorte de malaise de voir que Paasilina, en imaginant le pire, ne croyait pas si bien dire.

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