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Killer Joe (William Friedkin, 2012)

Par Doorama
Killer Joe (William Friedkin, 2012) Chris croule sous les dettes... Son idée pour s'en sortir ? Enrôler Joe, un flic tueur à gages, pour tuer sa mère et récupérer son assurance vie. Mais en attendant de toucher cet argent, il accepte de donner à Joe sa soeur Dottie en "caution". Joe s'installe chez la famille de Chris, difficile de dire qui de Joe ou de la famille de Chris est le plus immorale, mais Chris regrettera certainement son idée initiale...
Au sommet avec L'Exorciste, French Connection dans les 70's et même dans les 80's avec Police Fédérale Los Angeles, il y a longtemps que Friedkin n'avait pas frappé aussi fort. Certains avaient cru voir en Bug un sursaut du cinéaste, Killer Joe mérite, selon nous, bien davantage cette description. Excessif, cynique et barré, Killer Joe ne laisse pas indifférent, mais on se demande quand même où Friedkin veut nous emmener...
Noirceur, perversion et immoralité planent sur ce Killer Joe ! Le cocktail se compose d'une famille décomposée (voire pourrie !) et d'un tueur dominateur et méthodique, aussi dangereux que professionnel. Outre un impressionnant dynamitage de la famille américaine, Friedkin semble se défouler et se lâcher au plus haut point, il charge son Killer Joe d'une noirceur presque caricaturale, bien décidé à ne rien épargner au spectateur. Sexualité déviante (fellation d'un pilon de poulet provocatrice à l'excès) et appât du gain jusqu'à détruire toute limite, c'est en famille que l'on pratique l'association de malfaiteurs pour tuer sa mère (ou son ex-femme) et c'est avec Joe que l'on règle les affaires familiales dans des thérapies brutales. Killer Joe n'accrochera aucun sourire à votre visage, tant son glauque assumé l'empêche, mais Friedkin traite pourtant son sujet sous l'angle de la farce et du grotesque. Friedkin se la joue cynique et provoc' !
Si Killer Joe nous enferme dans une inexorable spirale dont on sait que la fin sera redoutable, si il ne nous laisse pas respirer, son mélange d'humour invisible et de violence nous interroge. Quelle est donc l'intention de Friedkin ? Killer Joe revêt un coté "réac" aussi jubilatoire que gratuit, il s'amuse à dresser un anti-portrait de la famille américaine, mais si on est heureux de découvrir une nouvelle facette de Friedkin, on se dit aussi qu'elle ne lui ressemble que peu, remplaçant la pertinence et la rlative sobriété de son cinéma par le clinquant, presque à la mode, de la surenchère. A l'aube de ses 80 balais, Friedkin se lâche, bien décidé à filmer ce qu'il veut, comme il le veut, sans se soucier du "qu'en dira t'on", et façonne sa charge comme un éjaculation presque pornographique. Quelque soit son efficacité et sa frénésie, Killer Joe ne ressemble pas à du Friedkin, ni dans sa forme, ni même dans ses intentions. Réussi ou pas n'est pas la question, Killer Joe poursuit derrière une narration classique une forme d'expérimentation, presque en roue libre, qui traduit selon nous davantage la difficulté de Friedkin à garder son sujet sous contrôle (trop âgé William ?) qu'à maîtriser ses décharges sexuelles et de violence.
Bien que Killer Joe semble ne pas appartenir totalement à son auteur, il témoigne cependant d'une énergie très forte, presque surpuissante et d'une noirceur fascinante. On y reconnait certes cette obsession Fredkinienne de donner au Mal un visage (McConaughey, ahurissant, y incarne un ange exterminateur bluffant !), mais son ton "no limit" lui impose aussi ses propres limites, en transformant son potentiel malfaisant en flirt avec une forme de grotesque. Killer Joe ressemble à du Pollock, libéré de toute contrainte, presque spontané, mais au lieu d'imposer une empreinte malfaisante définie et précise, revêt des apparences de gesticulations mal contrôlées. Film noir vertigineux et jouissif, mais déconcentré par une fantaisie presque incongrue, Killer Joe surprend le spectateur, le malmène et l'emmène sur des chemins atypiques, voire expérimentaux. Parfois gratuit sous couvert d'extrême, il s'impose finalement davantage comme une curiosité qu'une oeuvre maîtrisée de son auteur. Killer Joe est un film qui passe à côté de son intention initiale, mais qui trouve en chemin la réussite là où il ne la cherchait pas. Friedkin à réalisé le film d'un autre, un film hautement stimulant, mais étrangement mal défini. A l'mage de Linda Blair, Friedkin semble possédé par un virulent démon, son Killer Joe ressemble à un auto-exorcisme, impressionnant, mais dont le résultat obtenu ne ressemble en rien de ce qu'il était auparavant. Curieux Killer Joe, maladroit, déstabilisant mais fascinant...
Killer Joe (William Friedkin, 2012)

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