Bien curieux ce Guetteur... Mal nommé, mal fouttu, maladroit, mais pas mal du tout aussi... C'est l'homme de Romanzo Criminale (que nous avouons ne pas avoir vu, mais c'est promis, on en a envie, nous y viendrons), que la presse avait particulièrement bien accueilli, qui se colle à ce polar sombre et tendu, mais qui ne récolte cette fois-ci que peu d'éloges ! Ben nous on a aimé, enfin disons qu'on en a grandement apprécié certains aspects, et voilà pourquoi...
C'est sans doute parce que nous sommes assez fans de l'univers viril et pourri d'Olivier Marchal que Le Guetteur a su déployer son charme sur la rédaction... Les flics y sont durs, les méchants encore plus, et ce petit monde n'hésite pas à "faire ce qu'il faut" pour arriver à ses fins... Tout est dit, ou presque, Le Guetteur à un côté nerveux et très efficace, il fonce tête baissée (et dans le mur aussi...) sans se poser de questions et impose sans peine sa violence radicale et son esthétique grise. Bref, on se croirait dans Braquo, qui même s'il n'est pas un chef d'oeuvre, était sacrément jouissif à découvrir ! De surcroît, Auteuil nous fait son flic cabot comme on aime et Kasso et Gourmet semblent s'amuser eux aussi avec leur costume peu fin, mais finalement bien porté. Le Guetteur est un polar à la française comme on les aime, un peu dopé et bourrin, et ça c'est bien !
Ca a l'air bien vu comme ça, non ? Mais... Car oui, il y a un "mais"... Le Guetteur possède certes une belle énergie, tente bien de travailler ses personnages et leurs rapports entre eux, mais il s'éparpille aussi "façon puzzle" sans que l'on en comprenne trop bien l'intention première. Il enchaîne ses scènes de bravoure, travaille correctement ses scènes clés, mais pourtant rien ne se passe, rien ne se crée entre elles, il est un film sans âme ni intensité dramatique, qui laisse le spectateur devant un patchwork élégant, mais bien mal assemblé. Le Guetteur se disperse entre vengeance, jeu de chat et le la souris et un psychopathe tueur de jeunes filles (ben si !) sans que l'on soit vraiment excité par chacun de ses aspects. Où va donc son réalisateur ? Quelle histoire nous raconte-t'il au juste ? Bien malin qui pourra le dire, et surtout défendre le résultat final en s'appuyant sur une démonstration cohérente... Le Guetteur a la patate, un certain esthétisme (sans jamais éblouir non plus, car sa réalisation reste assez train-train), mais il reste désespérément sans enjeux ni réelle intensité, se contentant de coller bout à bout, sans dessein, ses scènes armées.
Alors oui, on s'est amusés comme des petits fous même (bon-public que nous sommes...), mais non, nous n'avons pas vu un "vrai" film. Nous avons assisté à un assemblage vendeur, à la manière d'une longue bande-annonce qui donnerait envie, mais au final n'avons ressenti qu'une excitation bornée à chacune de ses scènes d'action bien balancées. C'est d'autant plus dommage que bien des pistes auraient pu être exploitées à son avantage (ce qui aurait par ailleurs permis de faire des choix... !). Ce Guetteur fonctionne comme un bon épisode de Braquo, mais rate cependant tout son potentiel de montée en puissance. Dommage, car la matière est noble, mais en l'absence de finitions (même sommaires, pour le film comme pour son scénario mal articulé), ça reste une ébauche, efficace, mais maladroite.
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