Mandchourie, années 1930: le Cinglé braque des hommes d'affaires chinois dans un train et vole une carte que la Brute cherche, mettant la région à feu et à sang. Tous deux sont pourchassés par le Bon, chasseur de primes et fine gachette mais aussi par un gang chinois et l'armée japonaise.
Quatre ans avant la sortie de Django Unchained, Kim Jee Woon, le meilleur cinéaste coréen du moment, s'est lui aussi attaqué au western spaghetti pour en faire une version orientale directement inspirée du film Le bon, la brute et le truand très réussie. Au début, l'idée d'un western coréen peut paraître étrange mais dès les premiers plans, la Mandchourie paraît être un Far West chinois très convaincant où se croisent des hommes sans foi ni lois. Kim Jee Woon joue avec les mêmes ingrédients que Tarentino: humour et violence, le tout assaisonné par un excellent casting et accompagné d'une superbe bande originale (dont le fameux Don't let me be misunderstood, aussi entendu dans Kill Bill).
Tout le film repose sur une chasse: le Bon chasse la Brute et le Cinglé, la Brute chasse le Cinglé et éventuellement le Bon, le Cinglé chasse un trésor (tout en essayant de se défaire de ses trop nombreux poursuivants) et surtout sur trois personnages. Tous trois vivent en Chine parce que la Corée est depuis longtemps envahie par le Japon mais la Mandchourie ne restera pas longtemps un havre de paix. Ce sont des déracinés qui survivent grâce à la violence, notamment la Brute. Il perd absolument tout pour pouvoir se confronter au Cinglé. Son obsession frise même dangereusement la folie et Lee Byung Hun incarne à la perfection ce dandy psychopathe à la gachette facile. Le Bon est tout aussi implacable que la Brute mais plus sain d'esprit et juste motivé par l'argent qu'il peut tirer des primes de ses compères. Du coup, il est n'est pas très loquace et sa personnalité est peu développée. Celui qui tire la couverture à lui, c'est le Cinglé. Cet homme est une combinaison de bêtise feinte, de chance et d'absurdité et Song Kang Ho est rayonnant dans ce rôle farfelu.
Aucun temps mort dans ce film, depuis l'attaque de train qui l'inaugure jusqu'au "duel à trois" final, en passant par une course poursuite complètement folle et absolument mythique où le Cinglé est pourchassé par un gang chinois, les truands de la Brute et l'armée japonaise! Les clichés du western sont utilisés pour être savamment détournés. C'est grandiose, décalé et étourdissant; plus lumineux que A bittersweet life ou I saw the devil. Les films de Kim Jee Woon se suivent et ne se ressemblent pas, et pour ceux qui ne le connaissent pas encore, j'espère vous avoir donné envie de le découvrir.