Il m'a donc assez naturellement demandé si je pouvais recommencer.
Comment utiliser la médiation technique pour développer ses ventes
N'étant pas un apporteur d'affaires, je n'ai pu répondre positivement à sa demande. Je ne suis pas un commercial, mais un ingénieur, et je n'ai aucun goût pour la prospection commerciale. Ma propre prospection me suffit amplement.Mais après réflexion, je lui ai proposé une autre prestation. Une sorte de médiation technique, mais à l'envers.
Pour mémoire, la médiation technique, c'est simple. Un client a un besoin, il ne connaît aucun fournisseur pouvant y répondre, et ne sait pas où trouver cet oiseau rare. Le médiateur technique va utiliser sa méthodologie pour trouver des fournisseurs potentiels. Et pour ce faire, il va généralement consulter des secteurs d'activités différents de celui du client. L'acte d'achat reste à la charge du client.
Ça donne quoi, à l'envers ? Un fournisseur a une solution technologique, il veut trouver des nouveaux clients qui pourraient avoir besoin de sa solution. Le "médiateur technique à l'envers" va consulter des secteurs d'activité distincts des marchés actuels du fournisseur, afin d'identifier des clients potentiels. L'acte de vente reste à la charge du fournisseur.
Voyons ce que cela donne en pratique sur un cas simpliste.
Prenons un fabricant de boîtes à camembert. Il veut trouver de nouveaux clients, mais tous les acheteurs de boîtes à camembert sont connus (ce sont les fabricants de camembert, il y en a un nombre limité). Il fait appel au "médiateur technique à l'envers" pour qu'il trouve de nouveaux clients.
Ce dernier va appliquer une méthodologie de médiation technique :
- Il démarre par une étape de créativité, qui lui suggère des marchés nouveaux pour les boîtes à camembert. Les questions essentielles sont : quel type de problème ma boîte à camembert résout-elle ? et qui a rencontre le même type de problème ? Les fabricants d'autres types de fromage lui viennent à l'esprit, évidemment, mais il pense à d'autres marchés plus originaux, comme celui des boîtes à bijoux.
- Il explore ensuite ces marchés, d'un point de vue purement technique : il cherche à identifier quelles solutions existent déjà sur ces marchés pour résoudre le problème en question.
- S'il n'y en a aucune, c'est formidable, car le fournisseur va pouvoir proposer sa solution. Mais plus fréquemment, une solution existe déjà, et il faut alors comparer cette solution avec celle proposée par le fournisseur, afin de voir s'il dispose d'un avantage compétitif. Ainsi, il identifie des marchés pertinents pour le fournisseur.
Un renversement de situation incomplet
Parfait. Yapluka. À un détail près. Dans une vente, c'est surtout l'acheteur qui a le dernier mot. Le renversement de situation n'est donc pas parfaitement symétrique.En particulier, le "médiateur technique à l'envers" ne peut garantir que les clients potentiels qu'il va rencontrer sur ces marchés pertinents seront effectivement intéressés par un changement de solution. Même si la solution du fournisseur est la meilleure et la moins chère sur le papier, le changement en lui-même est souvent un obstacle à la vente. Personne n'aime bouleverser ses habitudes.
C'est pourquoi, le "médiateur technique à l'envers" n'identifie pas de clients potentiels, mais plutôt des typologies de clients intéressants. C'est donc une sorte de marketing, à fort caractère technique, que je qualifie de techno-marketing.
Le techno-marketeur (baptisons ainsi le "médiateur technique à l'envers"), à l'issue de sa mission, doit donc passer le relais à un marketeur plus classique, qui va étudier les nouveaux marchés visés, identifier les attentes réelles des clients potentiels, écarter les marchés les moins attractifs, affiner la stratégie d'attaque de des marchés les plus prometteurs, et éventuellement suggérer telle ou telle adaptation technique à la solution originelle du fournisseur. Le terrain sera alors préparé pour que les commerciaux du fournisseur passent à l'action.