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[feuilleton] Antoine Emaz, « Planche », 9/20

Par Florence Trocmé

 
« Comme un nageur venant du profond de son plonge
Ils sortent de la terre comme l’on sort d’un songe. » 
Amicalement, Tristan Hordé m’a rappelé le second vers. Son étonnante culture, toujours en expansion. 
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Bon spectacle de François Mauget à partir d’OS. Lui, et un guitariste. Je continue de penser qu’il faut laisser carte blanche à l’acteur. Autant je peux croire maîtriser l’espace de la page, autant je sais ne pas maîtriser l’espace de la scène. Donc, m’effacer, et laisser l’autre créer avec sa propre grammaire. Chacun son rôle. 
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Ce midi, Léo Scheer sur France-Culture : il égratigne François Bon au passage. Du coup, je suis retourné sur le site de François, pour voir un peu. Il propose une formule d’abonnement qui m’irait, avec téléchargement illimité. J’ai besoin de posséder un livre, de l’avoir sous la main même si c’est sur écran. Je pourrai télécharger tranquillement si ça m’intéresse : je pense à Chevais sur Schneider, à Berlottier, à Griot… bref des boulots qui m’intriguent. Sans compter la possibilité de rentrer dans l’i-pad toute une bibliothèque classique. 
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Un peu comme si la tête ne s’orientait pas, s’était mise en veilleuse. Je suis parfaitement capable d’agir au quotidien, de traiter les affaires courantes, mais pas au-delà. Pas de pensée, et encore moins de poésie. Pourtant je reste à la table, noircis les pages, fais mon minuscule boulot d’écrivain-fourmi, sans relâche. 
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Les fleurs ne rendent pas gai le jardin. Il est, fleuri, objectivement. Les couleurs sont revenues, mais sans provoquer d’élan particulier. Il y a un plaisir à sortir du triste vert/gris de l’hiver, et pouvoir longuement laisser la fenêtre ouverte, pas plus. Pour qu’il y ait gaîté, il faudrait sans doute que les yeux soient moins usés. 
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J’écoute d’une oreille l’émission de radio sur la culture française à l’étranger. J’entends bien la baisse de rayonnement, mais ne suis pas sûr que la réduction de la voilure budgétaire soit la solution, pas plus que la fermeture d’alliances françaises. Par contre, on devrait pouvoir revoir les nominations, le boulot et la paie des ambassadeurs. Mais cela ne se fera pas ; ce sont de trop beaux placards politiques. 
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Silence du livre parce qu’avant d’être lu, il est touché : grain du papier, épaisseur, poids, glaçage, maniabilité… Saisie olfactive, aussi. Le travail de l’œil et le bruit mental des mots viennent après cette approche physique. Un livre, c’est d’abord une peau. 
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Une logique visuelle n’est pas forcément transposable sur un plan littéraire. Je me souviens d’une discussion avec Pierre Emptaz à propos d’Arman, il me semble. Effectivement, visuellement, déconstruire 1 violon, ou 10 violons, ou 100 violons, cela donne des œuvres radicalement différentes. Changer d’échelle change l’œuvre finale. 
Pas sûr que cela fonctionne en poésie. Face à l’œuvre plastique, on a une vue globale, immédiate, donc l’effet d’échelle joue. En poésie, on lit, on a une saisie successive, linéaire : l’accumulation du même cesse d’intéresser, d’interroger sitôt qu’on en a compris le principe. On ne va pas lire cent pages de même, on vérifie seulement que c’est du même, et on s’interroge sur sa nécessité : enfermement ? aliénation ? Je repense à ce boulot intéressant d’A.J. Chaton : Evénements 99. Inventaire du banal de vivre, de l’infra-ordinaire comme aurait dit Pérec.  
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Travail de Pierre Emptaz pour le livre pauvre : dentelle de page. Travailler vide, travailler le vide, travailler à vide ? J’aime bien l’idée de retourner ce qu’on appelle « travail sur papier » qui devient ici travail sans papier. Je ne sais pas ce qu’en pensera D. Leuwers. Lui envoyer. En tout cas, je sens quelque chose noir chez Pierrot, une souffrance masquée par l’humour. 
épisodes 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8,
suite lundi 28 janvier 2013  
©Antoine_Emaz 


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