Histoire de Fantôme Japonais (Tokaido Yotsuya Kaidan, Nobuo Nakagawa, 1959)

Iémon épouse la fille d'un samouraï et promet de venger son père assassiné, alors qu'il en est en fait le meurtrier. Rapidement, il se lasse d'elle, lui préférant dame Emu, et transforme sa vie en enfer, jusqu'à l'assassiner elle aussi. Le jeune femme, trompée de bout en bout, reviendra le hanter pour trouver vengeance.
Bon... En fait "oui", mais "non"... Plus connu sous le nom de Tokaido Yotsuya Kaidan (non, on déconne...), Histoire de Fantôme Japonais reprend un conte horrifique traditionnel où une femme trahie revient se venger de son assassin. Souvent abordé dans le cinéma japonais ce conte-là se rapproche beaucoup de l'univers de Kwaidan (1965), mais son traitement est bien différent.
Alors que Kwaidan éblouissait par sa beauté visuelle, Histoire de Fantôme Japonais aborde ce conte sous une forme bien plus sage, et lorgne vers la série B fantastique. Exit donc la poésie et la méticulosité du traitement de Kobayashi, pour tenter de retrouver l'efficacité d'une histoire horrifique traditionnelle, un peu comme un Roger Corman l'a fait avec ses adaptations de Poe. Histoire de Fantôme Japonais nous narre les vilenies répétées de Iémon (et de son acolyte !), le meurtre de son épouse et comment ils subissent sa vengeance à travers son spectre. Même s'il trouve deux ou trois passages habités d'une belle énergie (comme sa fin notamment) ou d'une force surprenante (comme la malédiction de la femme de Iémon avant de mourir), Histoire de Fantôme Japonais ne nous emporte jamais vraiment totalement.
Dans l'absolu, Histoire de Fantôme Japonais est une production entre le drame et le film horrifique de genre, plutôt propre et réussie en son époque, mais hélas il n'en reste que bien peu de choses quand on le découvre aujourd'hui, tant des images plus fortes l'ont dépassé et tant le souffle initial censé l'habiter l'a complètement déserté. Il ne reste donc qu'une histoire peu rythmée, parfois même si maladroitement découpée qu'elle déstabilise le spectateur occidental pour en suivre le déroulement. Divisé en deux tiers dramatiques traditionnels et un tiers horrifique, l'ensemble peine vraiment à captiver. Il faudra quand même reconnaître que le dernier tiers, la vengeance de dame Iwa, parvient enfin à trouver un peu d'ampleur en proposant une ambiance très réussie, mélanges de folie grandissante et de quelques visions joliment mises en scène. Mais son ensemble, il faudra cependant adopter une approche bienveillante, voire même culturelle, pour se laisser séduire par son fond traditionnel et s'abandonner à la force morale de ce conte...
A l'exception de son final, le charme initial de Histoire de Fantôme Japonais semble donc définitivement évaporé. Ne reste que la simple curiosité de découvrir une oeuvre vintage, dans son jus, et qu'un espoir, peu récompensé, de rencontrer le frisson. Histoire de Fantôme Japonais tarde à se mettre en route pour jouer à plein sa fonction de film de genre, et le drame qu'il met en scène s'accorde mal de son turbulent final. Trop entre deux chaises (entre deux mondes ?) Histoire de Fantôme Japonais, bien que non dénué de tout charme, à bien mal vieilli et parvient difficilement à nous émouvoir comme à nous effrayer. Maintes fois portée à l'écran, cette incontournable légende traditionnelle, purement imaginaire, est tellement ancrée dans la culture japonaise que la tombe de Dame Iwa existe bel et bien dans le "vrai monde" au Japon. Cette anecdote ne sera pourtant pas suffisante pour nous convaincre de la qualité de cette adaptation-là, Kwaidan, ou même d'autres ghost-stories nippones à la Ring, méritent davantage votre attention que cette version. En inversant le dosage drame/fantastique à un tiers/deux tiers, on aurait peut être monté notre note d'un cran ou deux, mais tel quel, la rédaction est restée de marbre, malgré son final plus vivant !

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