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7 conseils pour martyriser un interprète en langue des signes

Publié le 11 décembre 2012 par Stéphan @interpretelsf

On trouve facilement des livres, guides, articles nous expliquant comment travailler en harmonie et efficacement avec des interprètes en langue des signes. Je vous avais notamment présenté celui-ci ou celui-là.
Soucieux d’innover en cette fin d’année,  je vous propose (et j’espère que mes collègues ne m’en voudront pas) 7 conseils pour exaspérer l’interprète qui durant une conférence de haut niveau doit vous traduire du français vers la LSF ou inversement.

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7. Communiquez-lui le moins d’informations possible :

Traduire une conférence n’est pas toujours aisé. On ne peut pas interrompre l’interlocuteur, il utilise parfois une terminologie complexe, son raisonnement n’est pas forcément évident…
Aussi, quand l’interprète, quelques jours avant la date fatidique, vous demandera « un peu prépa » pour assurer la meilleure traduction possible de votre intervention – car ce dernier (quel idiot!) n’est pas familier avec la physique quantique – répondez-lui avec un air légèrement méprisant : « pour quoi faire ! C’est simple je vais juste parler de la théorie des cordes, tout le monde connaît ça. De toute façon je ne rentrerais pas dans les détails ! »
Après tout si ce sont de vrais interprètes professionnels, ils sont sensés pouvoir tout traduire.

6. Lisez vos documents :

L’interprète dans son travail utilise la prosodie de l’intervenant (que ce soit en français ou en langue des signes) pour s’aider à comprendre le sens, à rythmer sa traduction. Surtout, elle séquence le discours, le rend vivant et évite ainsi que la personne s’exprime à la vitesse d’un tgv.
Aussi, pour déstabiliser un interprète, lisez votre texte d’une voix monocorde en ne marquant aucune ponctuation. Bien vite il devrait décrocher ne sachant plus de quoi vous parlez. Et si vous trouvez qu’il (ou elle) est décidément trop bon, marmonnez !

5. Soyez peu visible :

Si vous vous exprimez en langue des signes, la première condition pour être compris et donc traduit est d’être bien visible, bien éclairé par un projecteur.
Vous, au contraire, placez-vous à contre jour ou dans un coin sombre. Pire, empilez devant vous des livres ou des dossiers qui l’empêcheront de voir tous vos signes.
Et surtout, le matin, quand vous vous habillez, pensez à mettre un pull avec des rayures et des couleurs flashies pour que ça brouille son regard et qu’il attrape une migraine ophtalmique.

4. Digressez :

Ah les anecdotes qui n’ont rien à voir avec le thème de votre conférence ! N’y a-t-il rien de plus amusant que de parsemer la présentation austère d’un rapport annuel d’activités avec des petites histoires personnelles (par exemple la recette de la blanquette de veau à la Catalane que vous avez préparez hier soir pour votre fiancé) ou mieux, des histoires drôles semées de calembours et de jeux de mots intraduisibles, comme :
« Comment appelle-t-on un chat tombé dans un pot de peinture le jour de Noël ?
Un chat-peint de Noël ! »
La salle est pliée de rire et l’interprète incapable de faire passer l’humour fait la grimace. Et s’il cherche désespérément à trouver du sens derrière vos idées farfelues ou décousues il se noiera dans le ridicule.

3. Semez des embûches techniques :

Lors de grandes conférences, vous bénéficiez d’une aide technique (micro, ampli, enceintes…) pour vous faire entendre et comprendre.
Arrangez-vous pour que le matériel soit de piètre qualité : le micro qui chuinte, les enceintes tournées vers le public pour que l’interprète sur scène n’ait pas de retour son. D’ailleurs pourquoi ne pas le placer près de la climatisation afin que le bruit de la ventilation l’indispose…
Selon Daniel Gille et sa théorie des efforts l’acte d’interprétation se réalise dans la recherche d’un état d’équilibre entre trois efforts nécessaires au processus d’interprétation. Il s’agit de l’effort d’écoute et d’analyse ; l’effort de mémoire et l’effort de production. Si l’équilibre est rompu (par exemple si vous devez faire un effort supplémentaire pour entendre ou comprendre le locuteur) alors la qualité de l’interprétation s’effondre.

2. Utilisez une présentation sous Power Point :

La « PowerPointite » ou syndrome PowerPoint est un virus qui contamine tous les discoureurs et autres animateurs. Il provoque chez leurs auditeurs bâillements, soupirs et autres symptômes caractéristiques d’une forte crise d’ennui.
Pour un interprète en langue des signes l’utilisation par le conférencier de ce mode de présentation peut vite tourner au cauchemar. En effet l’interprète doit toujours être face au public quand il signe.
Alors, arrangez vous pour l’éloigner de l’écran afin qu’il ne puisse pas voir les diapos que vous projetez.
Puis utilisez les expressions telles que « comme vous le voyez ici » ou bien « remarquez ces chiffres là », ou encore « retenez cette définition » en simplement pointant du doigt ce dont vous parlez.
Pour vous suivre le malheureux devra continuellement tourner la tête et sera vite déboussolé. En plus, dans l’incapacité de voir les images sur l’écran, il ne pourra pas soulager dans son travail en pointant une citation, une succession de chiffres ou une liste de noms propres. Bref, il devra tout traduire !!!

1. Le coup de grâce :

A présent vous avez combiné ces astucieux stratagèmes et vous remarquez que des rougeurs apparaissent sur le front et les joues de votre interprète. C’est presque gagné, il va bientôt craquer. Son regard s’agite, des gouttes de sueur perlent sur son visage. Il est à point.
Tournez-vous vers lui et déclarez : « je suis surpris car vous ne semblez pas suivre. C’est embêtant : je tenais vraiment à ce que ces personnes sourdes (ou entendantes) comprennent mon exposé. Pourtant j’avais demandé à votre service un interprète diplômé et compétent ! Je vais devoir en référer à l’Afils ! »
Comptez jusqu’à 3 et il devrait vous hurlez dessus.
Cependant j’en connais certains qui parviennent encore à faire bonne figure. aussi je vous propose :  le coup de grâce.

Attention, cette réplique ne doit être utilisée qu’en dernier ressort et c’est à vos risques et périls car l’interprète en langue des signes peut avoir une réaction très violente en l’entendant.
Traitez le d’ « interface-traducteur en langage des signes pour sourds-muets ». Il ne s’en remettra pas.

Et vous, vous connaissez d’autres astuces pour les faire craquer ?

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PS : merci à lifeinlincs pour l’idée.



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