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La médecine à l’américaine

Par Carmenrob

« Vaut mieux être riche et en santé que pauvre et malade », disait l’humoriste. Mais quand la santé fout le camp et que tu vis aux États-Unis, vaut mieux être riche tout court (ou être Canadien et muni d’une bonne assurance voyage, ce qui ressemble fort à être Américain). Tel est notre constat à la suite des petits ennuis de santé de mon homme durant notre séjour en Floride. Oh! rien de grave : un tour de rein, conséquence d’un mauvais mouvement de golf. Je vous vois déjà refouler vos larmes. Mais, peu importe, grave ou pas, ces bobos-là, ça fait mal en maudit. Le nerf coincé entre deux vertèbres, et te voilà presque invalide. Le moindre geste t’arrache un gémissement, voire un cri. Mais je m’arrête avant d’entendre vos sanglots.

Après avoir, avec panache, ignoré la souffrance durant quelques jours,  Maurice doit se rendre à l’évidence : la douleur empire, l’enflure devient apparente, il faut agir. Nous contactons donc notre assureur pour le prévenir que nous allons consulter un médecin et pour obtenir des références de sa part. Le médecin identifié, nous tentons, tout comme la représentante de notre assureur, de joindre la clinique, mais sans succès. Il est neuf heures du matin. Officiellement, celle-ci est ouverte, mais… aussi bien nous rendre sur place pour prendre rendez-vous que de perdre notre temps au téléphone. Nous partons donc à petits pas pour ce bureau qui se trouve à quelques minutes de voiture du condo. Maurice explique la situation à la préposée et demande un rendez-vous. « Pas de problème, vous n’avez qu’à inscrire votre nom sur le registre et à attendre. Le médecin vous verra rapidement. » Ah! bon… Deuxième sujet d’étonnement, la clinique ne prend aucune carte de crédit pour la consultation qui coûtera 95 $. Nous n’avions pas prévu le coup, mais en mettant le contenu de nos porte-feuilles en commun, nous rassemblons la somme et nous nous installons dans la salle d’attente.

Nous ne sommes pas au bout de notre dépaysement. Nous remarquons que la salle d’attente est toute petite, 6 ou 7 fauteuils qui ne sont pas tous occupés. Au plus, quatre personnes y patientent, nous inclus. Notre observation des allées et venues nous permet de comprendre que le personnel se compose de quatre membres : le médecin, son assistante (sans doute une infirmière), une préposée à l’accueil (qui est toute, sauf accueillante) et une autre personne qui semble l’appuyer. Il appert rapidement que ces deux femmes sont entièrement occupées à communiquer et à transiger avec les assureurs, d’où peut être leur air d’écoeurite aigu. Il faut se rappeler que les Américains font maintenant tous affaire (à l’exception des plus démunis) avec un assureur privé, lequel cherche à débourser le moins possible et oblige patients et médecins à des entourloupettes, contorsions et contestations pour en soutirer le maximum. C’est le compromis consenti par Obama à la suite du rejet de son projet d’un programme d’assurance maladie publique pour les quelque 45 millions d’Américains sans assurance privée.

L’infirmière ouvre enfin la porte et appelle Maurice par son prénom. Tout comme la grande blonde qui l’accueillera chez le chiro un peu plus tard : « Maurice. Room number 3, honey. » C’est la norme. Le nom de famille? Sans intérêt. Mais revenons chez le médecin. Au bout d’un moment, trois quarts d’heure peut-être, Maurice réapparaît avec une prescription à la main et le nom d’un chiro. Forts de cette première expérience, nous décidons de nous rendre sur place pour prendre le rendez-vous, d’autant plus que cette clinique est à deux pas de la première. Le même scénario se reproduit. La demande de rendez-vous se transforme en consultation immédiate. Rayon X, examen et nouveau rendez-vous pour le lendemain.

Entre le petit déjeuner et le lunch, Maurice a donc rencontré deux spécialistes de la santé, il a en main sa médication (dont une partie, les antibiotiques obtenus gratuitement dans un supermarché-pharmacie Publix!) et un rendez-vous pour le lendemain avec le chiro. Quelle efficacité! Le même résultat aurait représenté des semaines d’attente au Québec. J’ai pour ma part patienté un an et demi pour une chirurgie mineure, mais dont dépendait pourtant ma qualité de vie. La longueur des listes d’attente pour diverses interventions fait régulièrement les manchettes, sans parler de la surpopulation des urgences des hôpitaux. De là à penser que quelque chose ne tourne pas rond au royaume de la carte soleil, il n’y a qu’un pas… Que nous sommes de plus en plus enclins à franchir en privatisant, mine de rien, notre système de santé. Et pourtant, si tout système est perfectible, l’égalité d’accès aux soins de santé reste pour moi un idéal qui a peut-être un prix.

Conclusion : aux États-Unis, quand tu as du cash, tu as des services. Quant aux autres…


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