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Pour dépasser le cap du million de chiffre d'affaire, les start-up nécessitent encore d'être coachées. Cela passe notamment par la réaffirmation de leurs liens avec les grands groupes et l’État.
Interview d'Eric Vaysset, directeur de Scientipôle Initiative et Croissance, interrogé dans le cadre de la soirée des Scientipôles, qui se tenait le 5 février à Paris, et dont l'un des buts était d'initier un appel à projet avec des dirigeants souhaitant partager leur success story.
L'Atelier : On parle souvent des problèmes à l'amorçage, mais une autre phase difficile est celle du passage de la barre du million de chiffre d'affaires ?
Eric Vaysset : Il existe en effet un réel problème de vitesse en France et les raisons à cela sont multiples. Elles trouvent leur origine aussi bien du point de vue du manque de financements ou du R&D, mais également sur l'aspect commercial que ces start-up n'arrivent pas à mettre en avant ou le fait que certaines n'aient même pas encore de forme propre. Et quand on se concentre seulement sur la France, on constate qu'il n'existe actuellement aucun étage intermédiaire entre les TPE qui représentent 92% des entreprises et les grands groupes. Or, les grandes entreprises ne veulent encore trop souvent pas prendre le risque de s'associer à des petites, bien que l'innovation n'est plus au cœur de celles-ci. Et sans cet appui, et au vu l'économie actuelle, les banques ne peuvent évidemment souvent pas suivre. Les start-up sont donc prises dans un cercle vicieux concernant leur autofinancement.
Alors quelles pourraient être les solutions que l'on peut leur apporter pour les aider à dépasser ce seuil ?
Il est nécessaire de mettre en place un cercle vertueux, où aussi bien les start-up que les grands groupes, les investisseurs et l’État s'entraident et y trouvent leur compte. Il faut notamment faciliter un développement rapide car nous estimons que plus les start-up mettent du temps a entrer sur le marché plus elles peinent à décoller. Pour cela, à Scientipole, par exemple, nous leur donnons accès à des ressources comme des business developpers, et nous les aidons, avec l'aide des collectivités d’Île-de-France à lever des fonds et à trouver des financements non bancaires. Ensuite, il faut les aider à se structurer aussi bien en les mettant en contact avec des consultants ou des associés, mais également à l'intérieur même de l'entreprise en élaborant des plans d'accompagnement RH. Enfin, il faut leur proposer des outils comme, toujours chez Scientipole, un réseau social privé où nous réunissons tous nos contacts et où elles peuvent se rapprocher d'autres organisations de leur domaine d'activité et de leur région.
Est-ce que, selon vous, le fait de stagner en dessous du million de chiffre d'affaire est un mal bien Français ?
Pas obligatoirement. C'est certainement quelque chose qui est de manière générale plutôt propre à l'Europe. Mais certains pays arrivent à s'en sortir. Je pense notamment à l'Allemagne où le tissu économique n'est pas le même qu'en France. Dans notre pays, par contre, on aide beaucoup les entreprises à se lancer via des incubateurs, mais il n'existe pas d'accompagnement par la suite. Et c'est pour cette raison qu'il est et restera difficile d'atteindre le niveau des États-Unis, et qu'on va tous à l'export, même si cela est compliqué. Et ce sera probablement toujours le cas car, il ne faut pas se leurrer, la grande différence que l'on a en France avec les États-Unis, c'est que leur marché intérieur avoisine les trois cent millions d'habitants. Et tout est lié puisqu'il existe également une véritable culture du risque ainsi qu'une plus grande facilité à lever de l'argent que l'on n'a pas encore en France.