La viande de cheval retrouvée dans la viande de boeuf des plats cuisinés des grandes marques de distribution révèle un incroyable trafic, l'insuffisance ou l'inefficacité criante des contrôles, et l'absence totale de traçabilité pour le consommateur, laissant la porte ouverte à toutes les manipulations.
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La viande de cheval retrouvée dans des plats cuisinés censés contenir 100% de viande de boeuf jette une lumière écoeurante sur l'origine et la qualité des produits vendus par les grandes surfaces, et peut être ailleurs, et pointe l'absence inadmissible d'informations pour le consommateur sur la traçabilité des produits.
Certes, Benoît Hamon, ministre délégué à la Consommation, vient de préciser que ses services de la répression des fraudes (DGCCRF) étaient parvenus à déterminer le circuit de commercialisation de la viande de boeuf dans laquelle de la viande de cheval avait été détectée. Mais le parcours de cette viande laisse rêveur.
Il se confirme ainsi que le fournisseur de Findus en plats cuisinés est l'usine luxembourgeoise Tavola, appartenant au groupe Comigel, qui avait acheté la viande surgelée à l'importateur Spanghero, qui avait lui-même acheté la viande auprès d'un trader chypriote, qui avait lui-même sous-traité la commande à un trader situé aux Pays-Bas, ce dernier s'étant fourni auprès d'un abattoir et d'un atelier de découpe situés en Roumanie... Six nationalités différentes sont ainsi concernées : Suède (Findus), Luxembourg (Tavola), Metz-France (Comigel), Castelnaudary-France (Spanghéro), Chypre (trader), Hollande (trader), et Roumanie (abattoir).
C'est tout simplement incroyable.
Aucune information de traçabilité ne figure sur les étiquettes des produits vendus en magasin (lasagne, hachis parmentier, moussaka, steacks hachés...). Aucun consommateur ne peut donc connaître les circuits glauques par lesquels la viande des plats préparés est passée. Mais qui achèterait les plats contenant cette viande infâme, achetée et revendue par des courtiers en bourse, rachetée par des transformateurs, qui les refilent aux grandes marques, s'il connaissait la vérité ?
Les marques concernées (Findus, Auchan, Casino, Carrefour, Cora, Monoprix, Picard)...ont retiré des rayons les plats cuisinés impliqués dans cette affaire. Et l'enquête de la DGCCRF se poursuit. Elle devra établir la liste des clients auxquels Comigel a vendu, en France et en Europe, des produits fabriqués à partir de viande acquise auprès du groupe Poujol ; déterminer si la tromperie sur la nature de la viande utilisée relève d'une ou plusieurs négligences ou s'il y a une volonté manifeste d'enfreindre la réglementation pour un profit financier ; et déterminer si d'autres circuits d'approvisionnement que celui mis au jour sont à suspecter.
Aujourd'hui 11 février 2013 une réunion de crise sera organisée au ministère de l'Economie par Benoit Hamon, avec Stéphane Le Foll, ministre de l'Agriculture, Guillaume Garot, ministre délégué chargé de l'Agroalimentaire, et les acteurs de la filière.
Il va falloir enfin que nos responsables politiques soient intransigeants sur les contrôles pour éviter que n'importe quelle viande puisse être refourguée par des escrocs et atterrisse dans nos assiettes. Et qu'ils aient le courage d'imposer aux industriels de l'agroalimentaire un étiquetage donnant aux consommateurs les informations indispensables sur la traçabilité des produits transformés.
Stella Giani