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La FNSEA ne veut pas de la Trame verte et bleue

Par Baudouindementen @BuvetteAlpages

La TVB avait été promise par le Grenelle de l’environnement. La trame verte et bleue devait permettre de construire un vaste réseau de continuités écologiques à l'échelle nationale. Elle provoque des tensions entre les associations, les élus locaux et les représentants du monde agricole.

Or, jusqu'à présent, la TVB ne satisfait personne. Les réactions déclenchées par la publication du décret d'application le 27 décembre 2012 illustre ces tensions. Il est jugé trop contraignant pour les agriculteurs, pas assez pour les environnementalistes.
"On attendait la parution du décret depuis longtemps, explique Maxime Paquin, de France Nature  Environnement (FNE), qui suit le dossier pour la fédération d'associations écologistes. Au final, on est assez déçus."
Le texte s'attache surtout à définir le contenu des schémas régionaux de cohérence écologique (SRCE) que doivent mettre en œuvre les conseils régionaux et les préfectures. Outre un diagnostic des espaces naturels et de la biodiversité régionale, ils devront identifier et cartographier les réservoirs de biodiversité – cours d'eau, parcs naturels nationaux et régionaux, sites Natura 2000 – et les corridors écologiques qui devront les relier de façon à protéger la mobilité de la faune. Car la fragmentation des espaces naturels constitue la première menace pour la biodiversité, devant la pollution.
Qu'il s'agisse par exemple d'une bordure lagunaire ou enherbée le long d'un cours d'eau, d'une bande arborée reliant plusieurs massifs forestiers, ou bien encore d'un ouvrage de type passage à faune, ces corridors seront inscrits dans les SRCE et devront "être pris en compte" par les programmes d'aménagement.
Et c'est là que le bât blesse pour les associations. "Nous avons pourtant milité pour une forte opposabilité des schémas régionaux de cohérence écologique par rapport aux documents régionaux d'aménagement du territoire", regrette Maxime Paquin. Louis-Narito Harada, avocat spécialiste du droit de l'environnement, poursuit : "Il faut maintenant voir comment la jurisprudence interprète cette notion de prise en compte" qui, dans le droit français, constitue le plus faible degré d'opposabilité.

Une agriculture sans contrainte, un faible intérêt pour la biodiversité

Mais, pour certains élus et agriculteurs, le texte va déjà trop loin. Le directeur de l'environnement et de l'urbanisme au conseil régional d’Alsace, témoigne de ces réticences : "Rien ne dit que la jurisprudence n'interprétera pas la "prise en compte" dans un sens assez strict. C'est d'ailleurs ce que craignent un certain nombre d'élus."
La méfiance des élus a d'ailleurs surpris le fonctionnaire territorial : "Le contexte est assez difficile. Pourtant l'Alsace est en pointe sur ce sujet, puisqu'elle avait lancé, dès 2003, son propre projet de trame verte", note-t-il. A cette occasion, un important travail pédagogique auprès des acteurs politiques et économiques avait été mené par les services de la région, si bien que les responsables pensaient que ce nouveau projet serait facilement accepté.
"Ça n'a pas été le cas. Les remous récents autour du grand hamster (un arrêté gouvernemental qui étend les périmètres de protection de ce rongeur suscite actuellement l'ire de nombreux maires du Bas-Rhin) ont sans doute échaudé pas mal d'élus, qui voient dans la TVB une nouvelle couche de réglementations environnementales."
Parmi les représentants du monde agricole, la FNSEA se montre particulièrement remontée contre le projet. "Les schémas régionaux de cohérence écologique deviennent des éléments prescriptifs pour les agriculteurs. Cela signifie encore des contraintes en plus. On crée un nouveau mille-feuille administratif, un empilement de plans qui met les territoires sous cloche. On fige les paysages dans le marbre alors que les territoires doivent pouvoir vivre et évoluer.”
Les autres traduisent le langage de la FNSEA par "On désire protèger les éléments naturels qui permettent le passage de la faune et limitent la perte de biodiversité alors que les agriculteurs désirent pouvoir continuer à produire quitte à arracher les haies, ne supportent pas la moindre frîche, désirent remenbrer les parcelles agricoles pour produire plus, en diminuant les coups de production. A quoi ça sert un grand-hamster ? On ne va pas s'arrêter de travailler pour quelques trucs qui ressemblent à des rats et qui vont de toute façon disparaître !" Une vision utilitaire de la nature d'un côté avec la priorité donnée aux activités économiques, un besoin de limiter la casse et de changer les pratiques agricoles de l'autre.

Un conflit environnemental classique en somme où les visions de la nature s'opposent. Business as usual d'un côté, changement de paradigme de l'autre.
La plupart des régions devraient remettre la première version de leur schéma d'aménagement écologique d'ici à la fin 2013. D'autres région, le Nord-Pas-de-Calais ou l'Alsace, devraient engager la consultation publique dès ce printemps. "Jusqu'ici, le projet se poursuit dans un relatif consensus", témoigne le directeur de l'environnement au conseil régional du Nord-Pas-de-Calais. La région est l'une des plus urbanisée et des plus industrialisée de France. La part d'espaces naturels y est très faible (13 % du territoire, contre 38 % à l'échelle nationale) et le quart de la biodiversité régionale serait actuellement menacé de disparition. Il est donc urgent d'agir.


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