Le visage dans le miroir joue un grand rôle dans notre vie.
En général, on s'identifie à lui ; on devient lui : ce que je vois là-bas dans le miroir j'affirme que c'est moi. Le visage dans le miroir a donc un énorme pouvoir : celui de me transformer en un être de chair et d'os, petit, limité, mortel. Il agit comme la méduse du mythe grec qui d'un simple regard transformait les hommes en statue de pierre.
Mais si je suis bien attentif, le miroir peut au contraire devenir mon meilleur ami, celui qui me libère, mon gourou. Le visage me montre en fait ce que je ne suis pas et si je prête attention aux faits, il peut m'éveiller à ce que je suis vraiment, vraiment.
Là-bas dans le miroir, je vois des couleurs; ici du coté de celui qui regarde, je ne vois aucune couleur.
Là-bas dans le miroir, je vois des formes ; ici du coté de celui qui regarde, je ne vois aucune forme.
Là-bas dans le miroir, je vois des yeux, une bouche ; ici du coté de celui qui regarde, je ne vois ni yeux, ni bouche.
Là-bas dans le miroir, je vois un objet ; ici du coté de celui qui regarde, je ne vois rien.
Là-bas dans le miroir, il y a un visage qui est vu ; ici du coté de celui qui regarde, je suis l'espace qui voit.
Ainsi, maintenant, je regarde mon visage dans le miroir non pas pour voir ce que je suis, mais ce que je ne suis pas. Il est une de mes apparences, non mon essence.
Dessin de Douglas Hardingjlr