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L’éloge des femmes mûres de Stephen Vizinczey : un récit qui dit l’esprit de la chair…

Par Alyette15 @Alyette1

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Devenu un best-seller mondial sans aucun soutien médiatique, « L’éloge des femmes mûres » n’est pas un récit labellisé Cougar, cette sinistre appellation d’outre-manche désignant  des femmes d’un certain âge affichant une préférence sexuelle pour les éphèbes.
« L’éloge des femmes mûres » est empreint du vertige délicat de son auteur, le hongrois Stephen Vizinczey, qui sous le pseudo d’Andras Vájda revient sur ce que fut son initiation érotique. Une éducation faite de gorges offertes, de hanches ondulantes, de parfums subtilement entêtants où les fragrances maternelles s’unissent aux effluves d’une sensualité lunaire et bienveillante, celle des femmes mûres.

C’est enfant, auprès des amies de sa mère, qu’Andras Vájda découvre le monde des femmes. Fasciné par les courbes féminines, il se plait à se blottir contre elles. Nous sommes en 1935, le nazisme pose sa botte sur la Hongrie et condamne son père à la mort. Envoyé chez les franciscains pour parfaire son éducation, Andras fait corps avec un certain mysticisme. Une voie qu’il ne fera qu’effleurer et c’est un jeune garçon seul fuyant les troupes russes que l’on retrouve  à la fin de la guerre sur les chemins de l’exil. En errance à Salzburg, il est recueilli au sein d’une base militaire américaine, lieu d’éveil sulfureux de ses premiers désirs. Devenu pourvoyeur en  prostituées pour le compte des GI, il prend conscience du pouvoir de la chair. De retour en Hongrie, il renoue avec le giron maternel et les tourments d’une adolescence avide d’expériences littéraires et polissonnes. Après de nombreuses déconvenues auprès de jeune filles ricanantes, c’est entre les cuisses de sa voisine de palier, une femme racée, qu’Andras s’initie aux vertus d’une volupté sans tabous. Suivront plusieurs relations, émaillées des frémissements de l’amour vache, avec des femmes compliquées, fuyantes ou offertes.

Ce parcours érotique non dénué d’humour et d’exaltations, ne peut cependant faire oublier au jeune homme  - devenu étudiant en philosophie –  le pouvoir totalitaire affligeant la Hongrie. A la suite de la révolution de 1956, las du joug de la censure, Andras décide de fuir. C’est en Italie, à Rome, qu’il fait ses premiers pas d’universitaire libre. Une femme, à nouveau, ravissante et frigide, donnera à son séjour romain des accents aussi troublants qu’inattendus. L’éducation sensuelle d’Andras prendra fin au cœur du « Nouveau monde » entre Canada et Etats Unis.

S’aidant d’une langue nuancée et épurée, affranchie de toute vulgarité, ce récit autobiographique en dit long sur ce qui fascine tant les hommes parfois jusqu’à l’obsession : le corps des femmes. Déclaration d’amour sans fausse pudeur, cet éloge est une invitation au lâcher prise et à l’enchantement des sens. Toujours respectées et aimées les femmes sculptées par la plume de Stephen Vizinczey sont tour à tour irrésistibles et tentatrices exemptes de toute tentative béate de déification. En filigrane, c’est bien de quête amoureuse qu’il s’agit, une quête dont le corps ne peut être exclu. Profondément humains et libres, les souvenirs amoureux d’Andras Vájda nous murmurent que la chair aussi a son esprit à elle.

Astrid MANFREDI, le 17/02/2013


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