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Ravel de Jean Echenoz

Par Sylvie
Editions de Minuit, 2006
Ravel
Je continue donc mon exploration d'Echenoz, revigorée par la récente lecture de Nous trois. Et je suis enthousiaste, c'est le moins qu'on puisse dire...
On sait que la "fiction biographique" est à la mode depuis plusieurs années ; nous avons eu la vie de Courbet pendant la Commune dans Le grand soirde François Dupeyron ou encore la vie du frère de Rousseau dans Fils uniquede Stéphane Audeguy
Ici on abandonne tout classicisme en découvrant une fiction très inattendue, loin de tout académisme. En effet, dès la première page, Ravel (sans étant cité) sort de son bain, s'habille et l'on apprend de manière très abrupte qu'il va mourir dans 10 ans très exactement.
Echenoz se libère d'une éloge du grand musicien et de l'élaboration du Bolero (qui devient une anecdote dans le roman) pour dépeindre un Ravel de la vie quotidienne, maniaque, très dandy (il collectionne les costumes et les paires de chaussures), sujet à l'ennui, à la neurasthénie, à l'insomnie qui va s'éteindre peu à peu d'une maladie dégénérative. Très peu d'événements pour saisir une grand personnage ; tout est dans la vie quotidienne la plus banale : l'habillage, le repas, le sommeil
Tout est écrit d'une manière très ironique comme toujours chez Echenoz. Alors qu'une s'agit d'une fiction très documentée nous apprenant beaucoup de choses sur la personnalité inconnue de Ravel, nous avons l'impression qu'il s'agit d'un pur divertissement. Echenoz nous promène, nous amuse...
Le grand musicien nous est présenté un peu comme une marionnette antipathique qui en fait baver à tout son entourage. On croit que c'est anodin, anecdotique et pourtant, c'est tragique puisqu'il s'agit de déchéance. Mais tout est traité au second degré. Et tout d'un coup, nous avons une phrase très brève qui nous ramène à la dure réalité, sans pathos.
Décidément, Echenoz est vraiment une voix très particulière dans la littérature contemporaine...
Les premières phrases (décidément pas classique !)

On s'en veut quelquefois de sortir de son bain. D'abord il est dommage d'abandonner l'eau tiède et savonneuse, où les cheveux perdus enlacent des bulles parmi les cellules de peau frictionnée, pour l'ai brutal d'une maison mal chauffée. Ensuite, pour peu qu'on soit de petite taille et que soit élevé le bord de cette baignoire montée sur pieds de griffon, c'est toujours une affaire de l'enjamber pour aller chercher, d'un orteil hésitant, le carreau dérapant de la salle de bain. Il convient de procéder avec prudence pour ne pas se heurter l'entrejambe ni risquer en glissant de faire une mauvaise chute"

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