Et c’est un plaisir de la suivre. Mais pour être honnête, j’ai eu du mal à rentrer dedans. Le début montre Camille, 40 ans, actrice de seconde zone, alcoolique notoire, en instance de divorce et complètement paumée. Je n’étais pas venue pour du pathos, je commençais à regretter mon choix. Et heureusement, ce début était trompeur.
Camille et Eric se sont rencontrés à 16 ans, ont eu très vite une petite et 25 ans ont passé. Fin de leur histoire. Camille repart un 31 décembre dans son passé d’ado, revit avec ses parents et se retrouve au carrefour de sa vie. Connaissant la suite, quels vont être ses choix cette fois…
En y allant, je pensais aux films d’échange de corps ou de retour dans le temps comme Freaky Friday (2003), 17 ans encore (2009) ou le cultissime Big (1988). Mais vous me direz que ceux-ci ne changeaient pas d’époque, effectivement Et c’est bien pour ça que j’ai eu du mal à me laisser embarquer. Noémie Lvovsky fait ça à sa sauce et celle-ci est unique. Je voulais direct rentrer dans le sujet, m’immerger dans le milieu des années 80 et rire des clins d’œil. Et heureusement pour moi, la réalisatrice qui interprète aussi le rôle de Camille, prend le temps d’installer la situation qui donne une profondeur et une poésie bien plus attrayante au final. Et de la réflexion qui m’a poursuivi hors de la salle aussi. Bien sûr le thème est connu : retour sur son passé, et si on avait choisi une autre voie et au final qu’en est-il de ce fameux bilan de vie que l’on fait tous régulièrement ? Je ne vous dévoilerai pas ses astuces de mise en scène car le mieux c’est d’avoir les surprises intactes, mais là où ça me gênait les premières minutes que les rôles d’ados soient joués par les adultes devient en fait une véritable force de ce film.
La reconstitution de l’époque est soignée que ce soit les décors, les accessoires et les attitudes des comédiens. En même temps, ils ont eu 16 ans en 1985, ça doit aider. Quant à la BO, sans être une playlist du genre, nous immerge bien. Mention spécial à 99 luftballons de Nena dans un walkman antique sur une bicyclette rose. Alors, on est loin de La Boum (1980) aussi car le regard sur le passé est forcément différent de la fraîcheur d’un film fait à cette époque. Mais on s’attendrit avec plaisir, même si j’étais très petite à l’époque. Beaucoup de références se teintent d’une nostalgie réconfortante.
Et au-delà de revivre les années 80, on est bien sur le thème universel de l’adolescence, qui, quoi qu’on en dise, sur les sujets les plus profonds, n’est guère différente en 1985 qu’en 2012 : Les relations à la famille, les changements corporels, les premières fois, les premières peines de la vie, etc et le tout vraiment dans un traitement original.
Et le casting est sublime. Je comprends parfaitement le prix SACD de la quinzaine des réalisateurs du dernier festival de Cannes. Noémie Lvovsky en tête dans l’interprétation d’une Camille forte et fragile, brisée et rebelle, tout en finesse. Ses amies, Judith Chemla (Josepha), India Hair (Alice) et Julia Faure (Louise) sont sur le même créneau. Au point qu’on aurait voulu en savoir encore plus sur elles, même si les tranches de vie laisse entrevoir ce qu’il faut pour s’y attacher. Samir Guesmi en Eric est aussi à la hauteur. Quant aux invités, il y tout ce qui compte de bons acteurs français sans tomber dans un cinéma élitiste et ennuyeux : Yolande Moreau et Michel Vuillermoz en parents de Camille, Mathieu Amalric en prof de français, Jean-Pierre Léaud, un horloger bien mystérieux et le très grand Denis Poladylès qui confirme son génie et sa maîtrise.
Je ne peux que vous le recommander, tant je suis sortie légère et enrichie d’un je ne sais quoi que je découvrirai plus tard, je pense.
Roseline
Camille redouble de et avec Noémie Lvovsky , Samir Guesmi, Judith Chemla, Yolande Moreau, Michel Vuillermoz, Denis Poladylès…Sortie en salle le 12 septembre 2012.