Comme je vous l’annonçais ce matin, je suis allé apporter mon soutien aux agents du cinéma municipal Le Méliès en grève depuis 34 jours. A 11 heures, le directeur artistique de l’équipement public, Stéphane Goudet, était convoqué pour un entretien préalable à licenciement pour faute. Il y avait des membres de l’association Renc’Art au Méliès, des spectateurs, les agents du cinéma et ceux de 3 autres services en grève : Affaires générales (100 % de grévistes), Etat-Civil (100 % de grévistes), Accueil Prestations à l’Enfance (100 % de grévistes). Mais revenons au cas Goudet, pour la symbolique qu’il représente. Parce qu’il est licencié depuis ce matin 12h, sans indemnité ni préavis.
Sans le nommer directement, il a été incriminé par l’amère comme responsable de « graves manquements ». Il faut se remémorer à ce sujet les mots de l’amère dans une tribune publiée par Libération lundi dernier, le 18 février :
Les événements récents autour du Méliès ne doivent rien aux supposées tentatives de «déstabilisation» dont vous (les réalisateurs qui l’ont interpellée le 14 février) vous faites l’écho, mais seulement aux responsabilités qui sont les miennes en tant que maire de Montreuil, face aux graves dérives constatées au sein de ce service municipal, dans la gestion des deniers publics. Après les enquêtes et contrôles réalisés par la ville et par le Trésor public, les faits sont là, incontestables : une double billetterie ne faisant l’objet d’aucune comptabilité a permis de soustraire des caisses du cinéma, donc des finances de la ville, des dizaines de milliers d’euros, utilisés ensuite selon le bon vouloir de quelques-uns, à l’insu de leur hiérarchie. Heureusement pour le service public, c’est une pratique illégale et passible de sanctions pénales.
Suivant le dossier d’assez près, je peux me permettre de vous signaler un léger rétropédalage dans les accusations portées par la rouquemoutte. D’affirmation sur un montant de « 143 000 euros » en termes de manque à gagner pour la mairie, selon les termes du rapport d’enquête signé par la directrice générale des services, nous passons à « des dizaines de milliers d’euros ». Chez un politique, le choix de l’approximation n’est jamais anodin. Dans ce cas, il est révélateur. Car, j’y viens, tout cela devait être remis sur la table lors de l’entretien au cours duquel Stéphane Goudet s’est vu signifier son licenciement à effet immédiat et sans indemnités.
Au vu de la gravité des faits agités par l’amère et son équipe tout au long des semaines passées, nous étions en droit d’attendre un dossier accablant le directeur artistique. Des dénonciations fracassantes autant qu’anonymes. Une botte secrète ! Enfin, nous attendions du lourd pour justifier qu’il soit - avec les autres membres de l’équipe du Méliès – ainsi traîné dans la boue, accusé de milles mots jusqu’à l’achat de drogue pour un réalisateur connu… Nous attendions donc… Et nous avons eu droit à notre comptant de surprise !
En substance, le dossier est vide. Aucun élément du rapport d’enquête diligenté par la municipalité n’est retenu pour justifier le licenciement de Stéphane Goudet ! Aucun ! Sont retenus contre lui le « manquement au devoir de réserve » ainsi que « des insultes subliminales sur Internet ». Encore faut-il préciser le « manquement au devoir de réserve ». Il ne lui est reproché que d’avoir écrit sur son profil facebook qu’il pourrait avoir des choses à dire en réponse aux accusations dont il fait l’objet. Ce simple fait le rendrait coupable, selon son interlocuteur exécuteur de la basse besogne, de « dissimulation d’éléments à sa hiérarchie », contribuant à une « mauvaise image de la Ville ». Fin de l’entretien, merci, au revoir.
Toute cette agitation, tout ce déballage, toute cette boue indigne d’élus de la République déversée depuis plus de deux mois… Pour ça ? Un « manquement au devoir de réserve » ? Alors, j’attends que les deux agents suspendus depuis le 6 décembre et frappés de mutation-sanction (ce qui est contraire à la loi, soit dit en passant), soient réintégrés immédiatement dans leurs fonctions et dans leur poste. J’attends que l’agent contractuel dont le contrat n’a pas été renouvelé soit réintégré immédiatement dans son poste et ses fonctions. J’attends que le stagiaire, qui aurait déjà dû être intégré comme fonctionnaire, voit la prolongation inepte de son stage annulée.
De l’aveu de la municipalité elle-même, il n’y a rien dans le rapport d’enquête sur la trésorerie du Méliès qui soit de nature à justifier le licenciement de Stéphane Goudet. Il y a donc encore moins qui ne justifie les sanctions prises contre les autres agents.
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