« Amour » triomphe

Amour, de Michael Haneke n’est ni ennuyeux, ni trop lent, ni dramatique, ni trop sombre, ni terrifiant. Il est bouleversant et juste. Construite avec finesse et équilibre, la déchéance du couple est amenée avec une certaine délicatesse. Aucun plan n’est trop long. Aucun sentiment ne semble exagéré. Rien n’est poussé au ridicule. Tout est subtilement dosé.

Parfois même, quelques délicates touches d’humour rendent l’atmosphère un peu moins pesante. Puis nous replongeons dans le drame du couple. Jusqu’à la prochaine respiration qui redonne du souffle à la dégression de la situation. Haneke maitrise parfaitement l’équilibre de son scénario, de la mise en scène et du jeu des acteurs. Il expose des scènes difficiles, gênantes, à la limite du supportable, mais ne va jamais trop loin. Il ne franchit jamais la limite virtuelle qui rendrait ce film non pas pesant mais pénible.

Cette situation difficile peu montrée jusqu’ici mais sûrement proche de beaucoup de gens, est dévoilée par Georges (Jean-Louis Trintignant, César 2013 du meilleur acteur) et Anne (Emmanuelle Riva, César 2013 de la meilleure actrice), deux personnages qui forment le couple d’Amour. Au début du film, nous les voyons complices et amoureux, d’un amour qui semble inépuisable.

Puis leur vie subit une mutation douloureuse et leur relation change du tout au tout. Chacun doit trouver de nouveaux repères. Au fil de l’évolution de la maladie, la communication devient de plus en plus compliquée. Malgré cela, l’amour perdure. Georges refuse de voir celle qu’il a aimé si longtemps sombrer. Georges choisit de se battre pour l’honneur de sa femme et ne supporte pas qu’elle puisse se sentir humiliée.

C’est aussi la difficulté de la situation pour les enfants qui est abordée. Une difficulté dont on sent bien les dimensions tant pour Eva (Isabelle Huppert), la fille d’Anne et de Georges, que pour le père qu’est ce dernier. Ainsi, Georges ne répond pas au téléphone pour éviter de devoir parler à Eva de l’état de sa mère.