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[Critique] MÖBIUS de Eric Rochant

Par Celine_diane
[avec spoilers] 
[Critique] MÖBIUS de Eric Rochant Cela faisait presque vingt ans qu’Eric Rochant n’avait pas touché au thriller d’espionnage, depuis Les Patriotes où un jeune français devenait agent du Mossad. Ce début d’année 2013 marque donc son grand retour avec le personnage de Grégory Lioubov (incarné par l’excellent Jean Dujardin), officier des services secrets russes, envoyé à Monaco pour surveiller un homme d’affaires (Tim Roth). Möbius possède une intrigue complexe, qui mise tout sur l’atmosphère plutôt que sur la clarté. Ce n’est pas forcément un défaut, du moment où l’on accepte de se perdre dans les dédales des buildings, les enjeux du récit, les non-dits et contre vérités. Si l’on y croise des figures de chair : Alice, une espionne tradeuse (Cécile de France, géniale), chargée également d’espionner le riche russe ; des équipes d’hommes et de femmes (belle prestation d’Emilie Dequenne) comme autant de pions sur des échiquiers, et divers puissants qui tirent les ficelles (CIA, FSB), Rochant donne surtout à voir un univers codé, gangréné par des chiffres et des graphiques, des abstraits de dettes et de pourcentages qui viennent déshumaniser tout le monde, insuffler du cynisme et de la froideur là où il y a de véritables êtres, des humains, des cœurs qui battent, des corps bien réels. Chose que l’on oublie parfois dans ce genre de films, où les espions sont le plus souvent réduits à des icônes fantasmées, et dont l’unique fonction est de mener un scénario du point A au point B. 
C’est ce qui explique, in fine, que Möbius attache tant d’importance au charnel, zappant en plein milieu le thriller, pour plonger la tête la première dans une histoire d’amour fusionnelle, incroyable car absolument inédite dans ce type de long métrage. Histoire d’amour impossible, aussi soudaine que violente, inexplicable qu'indéniable, entre Grégory et Alice. Passion éclair qu’ils ne maîtrisent pas, contrôlée par d’autres, boucle infinie et immuable prison. D’où le titre, qui en appelle à l’image du ruban de Möbius, où le cercle est composé d’une seule bande, qui revient inlassablement au point de départ. Sans en dire trop sur l’intrigue, qui parvient tout de même à maintenir correctement son suspense, malgré les distractions assénées tout du long (soit trois ou quatre intenses séquences d’intimité rarement égalées ces dernières années dans le cinéma français), on se contentera de dire que Rochant offre une belle métaphore sur ce qu’est la relation passionnelle via le genre d’espionnage. Impossible de se rappeler d’un autre film qui a osé ce parallèle là. D’autant plus qu’il est effectué avec une sincérité grandiose et à l’aide d’un duo d’acteurs ultra crédible. En amour, comme en affaires, nous ne sommes tous que de (consentantes) marionnettes, simultanément manipulées et manipulatrices, dit le film. Qui des russes ou de l’amour vrai a finalement grillé le cerveau de la pauvre espionne, expressément condamnée dès lors qu’elle est frappée de « coup de foudre » dans un bar ironiquement nommé « L’Apocalypse »? Les deux, assurément. 
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