Genre: documentaire
Année: 2013
Durée: 1h30
l'histoire: Nous avons tous été sur-informés pendant l’affaire dite d’Outreau. Elle a traumatisé les consciences et déstabilisé l’institution judiciaire. Jamais une affaire retentissante n’avait aussi peu divisé l’opinion publique. Comme si l’esprit critique avait été anesthésié. Pourquoi ?
La critique d'Alice In Oliver:
Attention, film choc ! Il y avait bien longtemps que le cinéma français n'avait pas déclenché une telle polémique. Avec Outreau, l'autre vérité, le réalisateur, Serge Garde, signe un documentaire coup de poing sur une affaire plus que difficile, l'Affaire d'Outreau.
Au départ, Serge Garde n'avait pas l'intention de réaliser ce documentaire. Finalement, sous l'insistance de Karl Zéro, le cinéaste finit par céder. Il sait qu'il s'attaque à un sujet tabou et surtout à un dossier comprenant plus de trente mille documents.
Serge Garde sait qu'il doit reprendre le dossier dans son intégralité. La réalisation d'un tel documentaire lui a demandé trois ans de travail: "Personne ne voulait parler au début. Par exemple, nous avons mis plus d'un an et demi pour obtenir l'interview du Juge Fabrice Burgaud".
Le but de ce documentaire n'est pas de remettre en cause le jugement final, à savoir l'acquittement des principaux accusés, mais de faire entendre la parole des enfants, en particulier Chérif et Dimitri Delay, deux victimes de violences et d'abus sexuels, et reconnus comme telles par la Justice.
Evidemment, le documentaire de Serge Garde suscite la polémique et de vives réactions de la part des médias, certains accusant le film d'être partial. Outreau-L'Autre Vérité n'est donc pas destiné au circuit normal de la distribution. Par là, comprenez que vous ne le verrez pas dans des grandes salles de cinéma. Serge Garde décide de reprendre l'Affaire de façon chronologique.
Tout commence de façon discrète en 2000 à Outreau, un ville de 14 000 habitants. Des enfants disent avoir été abusés par leurs propres parents, des voisins et des notables.
Les travailleurs sociaux se manifestent également et signalent des carences dans les familles d'origine. Une enquête préliminaire est ouverte. Le Juge Burgaud est alors désigné pour instruire l'affaire. Les enfants abusés sont placés dans des familles d'accueil différentes.
Ils accusent plusieurs adultes et affirment que de nombreux enfants ont été violés également. Dans cette sordide affaire, il existe deux cercles: le cercle familial et celui du voisinage, et un second cercle concernant plusieurs personnes extérieures.
L'affaire ne concerne plus seulement que des familles pauvres. Le dossier prend une ampleur inattendue. Il devient même totalement incontrôlable lorsque le Juge Burgaud reçoit la lettre d'un accusé. Ce dernier prétend que des enfants ont été assassinés et même enterrés dans un jardin près d'un immeuble. Néanmoins, par la suite, ce même accusé dira qu'il a inventé toute cette histoire pour prouver l'absurdité de cette affaire. Plus que jamais, l'Affaire d'Outreau connaît de multiples rebondissements. Très vite, la presse commence à s'interroger sur la crédibilité du Juge, accusé d'avaler les paroles de Myriam Badaoui, la mère de Chérif et Dimitri Delay.
Pire encore, la parole des enfants est de plus en plus contestée. C'est dans cette ambiance de peur et de pression médiatique que s'ouvre le Procès d'Outreau. Certains témoignages évoquent une proximité inédite entre les avocats de la défense et les journalistes.
D'ailleurs, un avocat le confirme dans le documentaire: "le rôle d'un avocat, c'est de défendre avant tout son client, pas forcément la vérité". Quant au procès, certains parlent d'une pièce de théâtre tournant à la parodie de justice. La salle d'audience est ménagée et certains enfants victimes sont même placés dans le box des accusés.
Les enfants deviennent ainsi les spectateurs de leur propre procès. Autre élément important: les 13 personnes accusées bénéficient de 19 avocats, alors que les enfants ne sont défendus que par deux avocats. Le film dénonce une stratégie de harcèlement et de contre-vérité opérée par les avocats de la défense. Tout semble avoir été fait pour discréditer les différents experts, également stigmatisés par les médias. Quant aux enfants, ils sont accusés d'être des menteurs.
Contrairement à tout ce qui a été dit dans la presse, le dossier Outreau ne tient pas seulement sur les déclarations de Myriam Badaoui.
En vérité, il existe un immense fossé entre ce que racontent les médias et la réalité du dossier. On passe ainsi d'un extrême à un autre: des enfants victimes des pires sévices à des enfants menteurs. Indéniablement, la défense a gagné la bataille médiatique.
Pire encore, l'affaire prend même une dimension politique. Lors du journal télévisé de 20 heures, les acquittés obtiennent les excuses de l'institution judiciaire. Chaque acquitté reçoit une indemnité comprise entre 300 et 500 mille euros, alors que les enfants victimes ne bénéficient que de 30 mille euros de dédommagements.
Quant au Juge Burgaud, il subit un véritable lynchage médiatique. Une commission d'enquête parlementaire est même organisée et diffusée en direct à la télévision. Le juge doit s'expliquer sur la façon dont il a instruit le dossier.
Rarement, une affaire aussi importante n'aura aussi peu divisé l'opinion et les médias. Au final, l'Affaire d'Outreau concerne 50 enfants, la plupart n'ayant pas été reconnus victimes. Inutile alors de préciser que Serge Garde signe un documentaire choc et coup de poing, qui a le mérite d'interroger sur ce dossier complexe, qui dépasse largement la sphère judiciaire.
Le moins que l'on puisse dire, c'est que le film brosse le portrait d'une institution en ruines (donc la Justice), la vérité n'ayant finalement que peu d'importance. Je précise également que je ne fais que réitérer le propos de ce documentaire dans cette chronique.
En aucun cas, je ne prends partie. Par conséquent, pas de note pour ce documentaire. Parfois, la critique doit savoir s'effacer et laisser place aux commentaires.
Outreau, l'Autre Vérité - Sortie en Salles: 06... par JaneBurgermeister