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Plan d’investissement pour le logement : l'objectif de lutte contre les recours abusifs

Publié le 21 mars 2013 par Arnaudgossement

avocats.jpgLe Chef de l'Etat a présenté ce jour les 20 mesures du "Plan d'investissement pour le logement". Plusieurs concernent le droit de l'urbanisme. L'une intéresse le contentieux du permis de construire. Focus.


Le dossier de presse de présentaiton du "Plan d'investissement pour le logement" peut être consulté ici.

Je vous propose également la lecture de cet ancien article sur le sujet.

La mesure n°4 Plan d'investissement pour le logement qui est au nombre des "5 mesures phares" et ainsi rédigée :

"Lutter contre les recours abusifs et réduire les délais de traitement des contentieux (mesure n°4)

Aujourd’hui, de nombreux recours dits « abusifs », ou « malveillants », sont déposés chaque année devant le juge administratif contre des permis de construire, dans l’unique but de monnayer le retrait du recours. La somme peut alors atteindre des montants très importants : plusieurs dizaines, voire centaines de milliers d’euros en fonction des enjeux du projet et de la « gourmandise » du demandeur. Il faut mettre un terme à ces manœuvres abusives.
Il faut dans le même temps que les recours légitimes contre les gros permis de construire, qui permettraient la réalisation de logements, soient jugés plus vite. Aujourd’hui, les délais de traitement des contentieux sont trop longs et pénalisent les constructeurs aussi bien sur le délai d'achèvement des travaux que sur la pérennité du mode de financements.

Objectif : diviser par deux les délais de traitement des contentieux

Un groupe de travail présidé par Daniel Labetoulle, ancien président de section au Conseil d’État, est chargé d’expertiser ce sujet. Les conclusions de ces travaux sont attendues d’ici la fin du mois d’avril et pourront être transcrites par voie d’ordonnance."

Luttter contre les recours abusifs est un véritable serpent de mer. A chaque plan sur le logement, le sujet est remis sur la table. Sujet difficile s'il en est car le droit au juge et protégé et le prétoire du Juge administratif est depuis toujours largement ouvert.

Ainsi, l'article 14 de la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement a limité les possibilités de recours des associations :

"Article 14
Après l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme, il est inséré un article L. 600-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 600-1-1. - Une association n'est recevable à agir contre une décision relative à l'occupation ou l'utilisation des sols que si le dépôt des statuts de l'association en préfecture est intervenu antérieurement à l'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire. »"

Tout le problème tient à ce que l'équilibre est trés délicat entre, d'une part le respect du droit au Juge, la protection de l'environnement et la protection des intérêts du titulaire de l'autorisation de construire.

Il est un secret de polichinelle que nombre de recours tendant à l'annulation d'un permis de construire sont en réalité les instruments d'un chantage : contre versement d'une somme, l'auteur du recours s'engage à se désister. Mais sont également qualifiés d'abusifs des recours tout à fait "légitimes".

L'enjeu  est donc de savoir ce qu'est exactement un "recours abusif". Tel recours pourra apparaître abusif du point de vue de telle personne et pas de telle autre. La réponse du droit est de laisser au Juge le soin, au cas par cas, d'apprécier si l'auteur du recours encombre inutilement son greffe ou défend réllement ses intérêts qu'il estime lésés.

Augmenter le montant de l'amende pour recours abusif aura-t-il un effet ? Sans doute pas car le prononcé de cette amende est rare. Ce sont davantage les frais irrépé ?tibles qui sont craints mais ceux-ci sont généralement assez bas.

A titre personnel, je pense que la problématique du recours abusif doit être inscrite dans une réflexion plus globale sur le contentieux administratif. Le procés administratif (contentieux de la légalité tout du moins) doit-il rester si ouvert ? Doit-il rester un seul procés fait à un acte ou faut-il reconnaître son caractère triangulaire ? Pour l'heure, le recours tendant à l'annulation par le juge administratif d'un permis de construire est largement ouvert à toute personne "ayant un intérêt à agir", condition appréciée de manière assez souple (mais pas toujours). Il n'est au demeurant pas suspensif et le bénéficiaire du permis peut en principe construire sans attendre le jugement. Nombreux sont cependant ceux qui attendent l'issue du procés pour sécuriser le financement du projet.

Au delà du contentieux administratif certaines pistes de réflexion permettraient de réduire le flux des recours. Ainsi, la réduction du nombre des autorisations d'urbanisme permettraient aussi de réduire le nombre des occasions de recours. Sur ce point, je milite depuis longtemps pour la création d'un permis environnemental unique, déjà adopté dans d'autres Etats de l'Union européenne. Autre idée, réduire les risques d'annulation en réduisant les risques de vice de procédure dans le droit fil de la jurisprudence Danthony du Conseil d'Etat.

Enfin, une fois le recours déposé, il serait utile de renforcer les pouvoirs du Juge administratif pour réduire les délais d'instruction. Beaucoup a déjà été fait dans ce domaine et les procédures sont objectivement bien plus courtes aujourd'hui. Mais toujours trop longues pour le propriétaire ou le maître d'ouvrage qui attend de construire...

Arnaud Gossement

Avocat associé - SELARL Gossement avocats


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